Les start-up embauchent à la chaîne, sans s’essouffler. Les petites misent sur les jeunes talents. Les routardes de la Silicon Sentier augmentent leurs exigences.
Cent, cinquante, vingt ou dix mais jamais zéro. Les start-up recrutent, recrutent et recrutent encore. Frénétiquement. Webmasters, commerciaux ou développeurs : les petites et les grandes ont besoin de monde, de beaucoup de monde. Mais pas forcément des mêmes personnes. Si les petites, un peu contraintes et forcées, misent sur les jeunes talents si possible à prix raisonnable, les start-up aguerries demandent maintenant du diplôme et de l’expérience, quitte à payer le prix. Et la crise du deuxième trimestre 2000 (avec le choc Boo.com) semble avoir à peine ralenti le rythme.
Question chiffres, les nouvelles et les anciennes start-ups ne jouent pas non plus dans les mêmes catégories. Les Multimania et Aucland, grands noms de l’Internet français et européen, annonçaient déjà dans Management du mois de juin des vagues d’embauche hallucinantes. Le site de vente aux enchères Aucland cherchait 150 personnes sur Paris et Sophia-Antipolis, l’hébergeur Multimania en voulait cent et Net2s, conseil en technologie, pas moins de 300 ! Chez ces barons de la nouvelle économie, les équipes ont doublé, triplé parfois et les locaux ont pris de l’ampleur. La folie des grandeurs continue. Inexorablement. " En moyenne, nous embauchons dix personnes par mois et ce n’est pas prêt de s’arrêter ", commente Anne-Catherine Huner d’Univers Technologie, une société de conseil en recrutement.
Toujours plus et toujours mieux.
Les start-ups ont grandi, elles veulent des grosses pointures et de l’expérience. Exemple chez Net2one qui édite des revues de presse à la carte. Dans la société du médiatique Jérémie Berrebi, le discours n’est plus à la fraîcheur avant tout : " Nous sommes très demandeurs de profils internationaux, de riches expériences. Bref de personnes avec carnet d’adresses. " dit Agnès Gicquel, responsable des relations publiques (là-bas, on dit " public relation manager "). Plus le temps de former. Les " vieilles " (plus d’un an) du e-business sont en pleine explosion, elles lorgnent sur l’international et attendent de leurs nouvelles recrues une efficacité immédiate. Citation explicite de Jean Triomphe, directeur général du portail automobile Procar.com : " L’un des critères déterminants est la valeur ajoutée instantanée que nous apporte un candidat. " Les émoulus des grandes écoles peuvent tenter leur chance : les cartes HEC ou Dauphine n’ont pas perdu leur pouvoir d’attraction. Les annonces d’embauche tombent directement dans les bureaux de leurs écoles. On est bien loin des débuts de la Silicon sentier, empire de la bidouille.
Les webmasters s’arrachent à prix d’or
Chez ces routards du net, les surdoués du web n’ont plus la priorité. Alban de Villeneuve, directeur business développement de la place de marché Equesto analyse la situation : " Les fondateurs ont fait la démarche de créer la boîte. Maintenant il faut créer des compétences métier. Nous ne demandons pas obligatoirement aux candidats une casquette Internet mais plutôt une expérience dans la spécialité demandée. " Seuls épargnés : les métiers nés avec la toile, où tout le monde est le bienvenu. Webmasters et développeurs s’arrachent à prix d’or. Denrée rare sur le marché, ils sont devenus le cauchemar des recruteurs qui ont tous le même commentaire : les postes les plus difficiles à pourvoir sont les postes techniques.
Sur ce marché tendu, les chasseurs de tête sont rentrés dans la danse. Le recrutement s’est institutionnalisé et les " vieilles " start-up font désormais appel à des cabinets pour recruter, voire débaucher leurs directeurs, managers ou chefs de pays, le haut de la gamme. Une méthode qui en énerve plus d’un. Chez Numeriland, une boîte de publicité, Alexandre Stopnicki juge même la démarche suicidaire : " Nous ne débauchons jamais. Je crois que c’est la plus mauvaise méthode aussi bien pour les salariés que pour les employeurs. Nous sommes, au contraire, dans une démarche active de formation et donc de fidélisation. "