L’Assemblée nationale a adopté à l’unanimité le 18 octobre, un article du projet de loi de finances pour 2001 qui favorise le don d’ordinateurs par une entreprise à ses salariés.
Jean-Marie Messier, le PDG de Vivendi, va pouvoir, comme il l’avait annoncé en juin et à la suite du groupe américain Ford, distribuer (presque) gratuitement des ordinateurs à ses 170 000 salariés français. Les députés ont en effet adopté, sans aucun débat, l’article 3 du projet de loi de finances pour 2001, qui vise à "réduire le fossé numérique" entre la France et les principaux pays de l’OCDE. Ce texte prévoit que la fourniture ou la mise à disposition gratuite ou pour une somme modique, de matériel informatique neuf, de logiciels ou de "prestations de services liées directement à l’utilisation de ces biens" - par exemple, l’abonnement à un fournisseur d’accès - soit exonéré d’impôt sur le revenu et de cotisations sociales. Jusqu’alors, l’impôt sur le revenu devait en effet s’appliquer à tout "cadeau" fait par une entreprise à son salarié, au titre des avantages en nature. En revanche, ces "dons" seront passibles, pour les entreprises, de l’impôt sur les sociétés puisque l’amendement prévoyant ce type d’exonération, proposé par le député RPR Gilles Carrez, a été repoussé.
Pas plus de 10 000 francs
Quelques conditions au don d’ordinateurs sont tout de même fixées : ces dispositifs devront avoir été définis dans un accord d’entreprise ou de groupe, conclu entre le 1er janvier 2001 et le 31 décembre 2002. Et le montant du matériel concerné ne peut excéder une valeur de 10 000 francs, soit une configuration informatique de base, comprenant un micro-ordinateur, des logiciels standards, une imprimante et un accès Internet.
Reconnaissant avoir été influencé par les demandes de très grandes entreprises comme EDF, France Télécom ou Vivendi, le rapporteur de la loi de Finances, Didier Migaud, explique d’abord dans son rapport qu’il s’agit d’éviter que "la générosité par forcément désintéressée de l’employeur" ne conduise des salariés à acquitter des impôts supplémentaires. Justifié par le désir de résorber le "fossé numérique" entre la France et les principaux pays de l’OCDE, le dispositif temporaire permettra également de jouer "sur la complémentarité des utilisations ludiques, privées ou professionnelles des nouvelles technologies de l’information et de la communication, notamment d’Internet". C’est précisément ce risque d’une confusion entre vie privée et vie professionnelle qui inquiète certains syndicats des entreprises qui ont annoncé leur intention de profiter du coup de pouce fiscal, comme Prisma Presse, ou France Telecom (lire Chez France Telecom le surf gratuit se paie).
Il semble d’ailleurs qu’un certain flou subsiste : le rapport de la commission des finances ne contient pas de prévisions chiffrées, ni sur le nombre de salariés qui pourraient être concernés, ni, plus étonnant, sur le "coût fiscal" de cette mesure. Pour ne pas pénaliser les salariés des petites entreprises, Gilles Carrez avait aussi proposé que ce soit l’achat des ordinateurs qui soit défiscalisé. Le gouvernement a refusé, au motif que ce serait trop coûteux et que la baisse de l’impôt sur le revenu ne profite qu’à un salarié sur deux.