Annoncée pour 2001, la grande loi sur la société de l’information ne sera pas adoptée avant fin 2002, voire début 2003. Le député RPR Patrice Martin-Lalande s’agace de ce retard. Le socialiste Patrick Bloche lui répond.
L’idée avait été lancée en septembre 1999, après les journées d’Hourtin : une grande loi sur l’entrée de la France dans la société de l’information. Au menu : des dispositions sur la protection des données personnelles, le haut débit ou la lutte contre la cybercriminalité. Annoncée pour la fin 2000, sa présentation devant le parlement a été plusieurs fois repoussée. La première lecture à l’assemblée, avec un peu de chance, devrait avoir lieu à la fin de la session parlementaire, en juin. Mais compte tenu du calendrier (budget à l’automne et élections au printemps), il faudra sans doute attendre début 2003 pour l’adoption définitive. Député RPR et auteur d’un rapport sur Internet pour le gouvernement Juppé, Patrice Martin-Lalande proteste contre ce retard
Patrice Martin-Lalande
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Que reprochez-vous au gouvernement ?
Je ne comprends pas que l’adoption de la loi sur la société de l’information soit encore reportée au-delà de la présidentielle de 2002. Le projet ne sera déposé qu’en avril ou en mai. Cela veut dire que l’on va commencer à évoquer des problèmes au moment où ils sont plus que mûrs.
Quels sont les dossiers que vous estimez devoir être traités en priorité ?
Si l’on doit encore légiférer sur la responsabilité des hébergeurs, c’est dommage d’attendre. Par ailleurs, on pourrait transcrire beaucoup plus vite les textes européens, comme la directive communautaire sur la protection des données personnelles. Cette attente risque avant tout de ralentir la croissance des entreprises par rapport à celles des autres pays.
Vous pensez que le calendrier parlementaire est un mauvais prétexte ?
Cela prouve que cette loi attrape-tout place le gouvernement dans l’embarras. Il semble avoir du mal à légiférer en matière de communication publique. Il a déjà mis un an et demi pour adopter la loi sur la liberté de communication (LSI). Il veut maintenant présenter cette LSI qui regroupe des dispositions très hétérogènes. C’est une mauvaise idée de tout mettre dans un seul texte. Il vaudrait mieux traiter les questions au fur et à mesure, comme ça a été fait avec la loi sur la signature électronique. Là on aligne toutes les dispositions sur celles qui sont les plus longues à élaborer. En plus, tout est géré au niveau ministériel. J’aimerais bien pour ma part que le Parlement soit davantage associé. Qu’il y ait un débat préalable, même sans vote, sur l’entrée de la France dans la société de l’information.
Patrick Bloche
Transfert |
Que pensez-vous du retard pris par le projet ?
Il ne faut pas céder à l’urgence du simple fait qu’il s’agit d’Internet. Il faut aller extrêmement vite parce que la technique pourrait dépasser le droit. En fait, la plupart du temps, le droit commun s’applique. Il s’agit donc avant tout de l’adapter. L’adoption définitive ,en effet, ne pourra pas se faire avant 2002. Mais le texte passera en conseil des ministres au cours de ce trimestre et devrait commencer à être discuté à la fin du deuxième trimestre 2001.
Patrice Martin-Lalande dénonce une loi fourre-tout...
C’est vrai qu’elle est globale, que c’est une sorte de patchwork. Mais je ne crois pas que la décomposer en plusieurs petites lois ferait avancer les choses plus vite. Chacune d’entre elles devrait suivre de la même façon la procédure parlementaire. A moins qu’on ne considère, comme certains députés de l’opposition, qu’il n’y a pas besoin de loi.
Certains craignent des dispositions très sécuritaires. L’assemblée pourra-t-elle modérer ces ardeurs ?
Je ne dispose pas du texte de loi pour l’instant. Mais j’espère bien que ce ne sera pas un projet trop chargé d’éléments répressifs, qu’il se souciera d’abord de préciser que la communication en ligne est libre. Je fais confiance au gouvernement. Et en tout état de cause, les députés ont toujours été attentifs à la prise en compte des libertés publiques.
Qui prendra en charge l’examen de la loi en commission ?
Il pourrait se créer une commission spéciale puisque la loi touche à des domaines très différents. Et je suis prêt à être le rapporteur de la loi.