Une start-up tente d’unifier le monde des messagers instantanés en proposant un logiciel compatible avec plusieurs standards. En position de quasi-monopole sur ce secteur, AOL ne l’entend pas de cette oreille.
Mettre le géant AOL en difficulté. C’est l’exploit que vient de réaliser Odigo. Cette start-up américano-israélienne propose un nouveau logiciel de messagerie instantanée. Un domaine où cohabitent déjà plusieurs programmes (ICQ, AIM, Tribal Voice, Firetalk, Excite, Yahoo ! Messager...) non compatibles entre eux. L’atout d’Odigo, c’est de permettre la communication avec ICQ et AIM, tous deux propriétés d’AOL. Cette dernière, qui contrôle 90 % du marché de la messagerie instantanée, n’a guère apprécié cette tentative d’unification forcée : dix jours seulement après sa sortie, lundi 12 juin, les utilisateurs d’Odigo se sont vus refuser l’accès aux serveurs d’AIM pour de prétendues raisons de sécurité. Dès le lendemain, Odigo proposait à ses utilisateurs un patch permettant de contourner l’interdiction d’AOL.
Mercredi 14 juin, la start-up a reçu le soutien indirect des autorités anti-trust américaines. Dans le cadre de son enquête d’agrément sur la fusion avec Time-Warner, la FTC (Federal Trade Commission) a enjoint AOL de fournir au gouvernement et à ses concurrents toutes les spécifications de sa messagerie AIM.
Secteur porteur ?
Chez AOL, on feint l’indifférence. Pour Barry Schuler, le président d’AOL Interactive Services, la mise en garde de la FTC n’a rien d’alarmant. "C’est tout le processus de fusion qui est passé au peigne fin", a-t-il expliqué. Le cas des messageries ne serait donc pas traité à part. De même, l’incompatibilité des systèmes existants ne causerait "aucun dommage aux consommateurs" puisque "AIM est gratuit sur Internet". Dans un exercice de haute voltige, ce responsable a même estimé que "la messagerie instantanée n’était pas un secteur porteur" tout en promettant la sortie "prochaine" d’un logiciel "universel".
Microsoft soutient Odigo
Un autre acteur du secteur suit avec attention les développements de l’affaire : Microsoft. Ravie qu’on s’en prenne à un puissant concurrent, la firme de Redmond a immédiatement apporté son soutien à Odigo. Le geste n’est pas innocent. Il y a près d’un an, Microsoft avait fait un pas vers l’unification en proposant un messager MSN compatible avec AIM. Comme dans le cas d’Odigo, AOL avait alors bloqué l’accès à ses serveurs AIM sous de discutables prétextes. En réaction, Microsoft, Yahoo !, Excite et d’autres se sont retrouvés au sein de l’association FreeIM pour promouvoir l’élaboration d’un standard de messagerie instantanée. Selon ce groupe d’industriels de la communication, la messagerie instantanée est appelée à démultiplier les opportunités de commerce électronique. Reste à lever l’obstacle AOL. Devant les juges ou pas.