Avec son abonnement haut débit, PlayLouder MSP offre le son de cinq labels indépendants
La société britannique PlayLouder, qui édite le portail musical éponyme, va lancer début 2004 une offre d’accès haut débit à internet associée à un service inédit de téléchargement de musique. Les abonnés de Playlouder MSP (Music Service Provider) pourront télécharger et partager leurs fichiers musicaux avec les autres abonnés, via les logiciels d’échange P2P habituels, en toute légalité : PlayLouder, qui a passé des accords avec cinq labels indépendants, reversera à ces maisons de disques les droits correspondant aux morceaux téléchargés. Le modèle, inspiré des radios, pourrait séduire un large public, mais pas forcément les majors. Pascal Nègre, le PDG d’Universal, est "farouchement contre".
Sur le portail musical Playlouder, les internautes peuvent écouter des morceaux en avant première : ils sont proposés gratuitement en flux streaming, ou en téléchargement payant.
Un réseau dans le réseau
A partir du 1er novembre 2003, ils pourront tester un service de téléchargement disponible sur abonnement. En utilisant Kazaa ou tout autre logiciel peer-to-peer d’échange de fichiers, ils téléchargeront les morceaux de leur choix, choisis dans le catalogue de cinq labels : Beggars Banquet, V2 Music, XL Recordings, Pias et Ninja Tune.
Dans ces riches catalogues, on trouve par exemple les oeuvres des Pixies, de ColdCut, des White Stripes, de Badly Brawn Boy, de Grandaddy ou Laurent Garnier.
"Cela fait quatre ans que nous travaillons avec plusieurs labels, explique Paul Hitchman, président de Playlouder. Nous avons gagné leur confiance en leur présentant une solution à la question du P2P qui tienne compte de leur perspective".
Les échanges s’effectueront entre abonnés, à l’intérieur des réseaux P2P. Un circuit fermé que les responsables de Playlouder comparent à un "jardin muré". Ce principe rappelle celui des darknets, des réseaux fermés et cryptés d’échange de fichiers. Le manque d’ouverture pourrait refroidir certains utilisateurs potentiels, ainsi coupés de la pléthorique offre "pirate" des réseaux.
Paul Hitchman réfute l’argument. Le président de PlayLouder estime que, par rapport aux réseaux P2P "classiques", le système qu’il propose présente plusieurs avantages pour les internautes. "Il améliore la pertinence des recherches et la vitesse des transferts, souligne-t-il.
En tant que fournissseur d’accès à Internet et à de la musique en ligne, il ajoute que ce système possède aussi plusieurs atouts :"Les abonnés bénéficieront de "nodes" spéciaux, à haute capacité, qui leur seront réservés. En supprimant le trafic qui s’effectue sur les réseaux de p2p via des nodes hasardeux, ce système nous fera économiser de la bande passante, nous permettant ainsi d’investir dans de nouveaux services".
"Une vaste fumisterie" selon Universal
Le système de PlayLouder s’apparente quelque peu au projet Lamp (Library Access to Music Project). Développée par deux étudiants du MIT (Massachusetts Institute of Technology), Lamp est un système de "diffusion à la demande", fondé sur tous les disques de la bibliothèque de cette université, via son réseau câblé. La musique circule ainsi en circuit fermé et il est impossible de la copier ou de la télécharger. Ce mode de diffusion est légal, estiment ses créateurs, qui l’apparentent à de la "radio à la demande".
La comparaison avec le modèle des radios s’applique aussi au système de PlayLouder. Ce qui ne semble pas déranger les labels indépendants comme ceux qui collaborent avec ce "fournisseur d’accès à la musique", mais pourrait refroidir certaines majors.
Interrogé sur Playlouder, Pascal Nègre, président d’Universal Music France, critique le projet avec véhémence : "Ces systèmes me font très peur, car ils s’assimilent à de la licence légale sur le P2P. C’est une vaste fumisterie : nous voulons décider de ce que nous vendons, du prix auquel nous vendons, et nous voulons contrôler cela. Je suis farouchement contre."
Pour Paul Hitchman son président, la solution de Playlouder constitue "la seule façon réaliste de rentabiliser et légaliser le partage de fichiers. Au Royaume-Uni, si tous les fournisseurs d’accès suivaient notre modèle, cela augmenterait les revenus des maisons de disques de 200 millions d’euros par an."
Michel Lambot, co-président du label PIAS, dont les propos sont repris sur le communiqué de presse annonçant le lancement de Playlouder MSP, partage cet avis : "il s’agit du compromis parfait entre les fans et les propriétaires de droit." Réponse à partir de janvier 2004.