L’IRIT (Institut de recherche en informatique de Toulouse) met au point un nouvel outil informatique dédié à "la visualisation" de tableaux par des non-voyants. Grâce à un joystick à retour de force, capable de transmettre les formes et les reliefs d’une œuvre d’art qui s’affiche sur l’écran d’un ordinateur, les non-voyants peuvent apprécier de façon un peu plus intense qu’à l’aide de simples descriptions, la façon dont sont construits des tableaux ou des sculptures. Une initiative intéressante mais qui, selon l’avis d’un premier utilisateur, nécessite encore quelques ajustements avant de pouvoir honorer ses promesses.
Le projet de l’IRIT est né sous l’impulsion de la fondation privée Bemberg à Toulouse. Cette fondation, qui propose des visites des tableaux de la collection Bemberg, souhaite rendre ces oeuvres d’art plus accessibles aux non-voyants. Elle a donc participé au financement de cet outil qui associe retour de force, scan et synthèse vocale.
Le dispositif développé par l’IRIT reprend le système des "périphériques à retour d’effort", utilisés pour les jeux vidéo. Un bras articulé, baptisé Phantom, pilote un curseur qui balaye une oeuvre d’art affichée sur un écran. En rencontrant une ligne ou un contour, le joystick manipulé par l’utilisateur montre une résistance permettant de sentir des formes, dont les contours sont reproduits en trois dimensions.
Pour compléter ce système, un programme recourant à la synthèse vocale annonce à quoi correspondent les formes balayées.
Ainsi, le non-voyant possède de multiples données pour se représenter dans son intégrité un tableau ou une sculpture.
"Sentir" la peinture
Les chercheurs qui travaillent sur ce système pensent qu’il pourra un jour s’adapter aux tableaux dont les peintures sont pointillées, floues ou dégradées.
"Mis au point l’an dernier sous forme de prototype, ce système devrait être opérationnel dès l’année prochaine", souligne Antonio Serpa, ingénieur à l’IRIT . Le musée du Louvre et la Cité des Sciences sont déjà intéressés par cette nouvelle technologie, qui permettra d’améliorer sensiblement l’accès de certaines oeuvres d’art aux non-voyants.
Mais cette technologie reste chère pour l’instant, entre 10 000 et 15 000 euros pour le dispositif complet. A cet inconvénient s’ajoute la difficulté d’apprentissage. Selon Bernard Oriola, ingénieur d’étude non-voyant à l’IRIT qui a testé le système, "pour avoir une bonne représentation, il faut de l’entraînement, car ce n’est pas immédiat. Les aveugles perçoivent les sensations au niveau des mains et des doigts, alors que le joystick apporte les sensations au niveau du bras". Des "souris à retour de force", qui font l’objet de recherches menées dans d’autres laboratoires, seraient selon lui plus intuitives pour les utilisateurs.
Pour Bernard Oriola, il convient donc de rester prudent au sujet de l’avenir du Phantom. "Sans être frileux, je pense qu’il est trop tôt pour dire s’il sera véritablement accessible à tous."
Le groupe de recherche de l’IRIT qui travaille sur ce projet:
http://www.irit.fr/recherches/MODEL...
La fondation Bemberg:
http://www.fondation-bemberg.fr/ind...
L’espace tactile du Louvre, qui organise des visites guidées aux personnes non-voyantes:
http://www.educnet.education.fr/sec...