L’association de défense des consommateurs UFC-Que Choisir vient d’annoncer qu’elle porte plainte contre trois maisons de disques (EMI, Virgin et BMG) qui diffusent des CD dits "protégés". Une action en justice similaire avait déjà été engagée contre EMI, BMG et Sony par l’association concurrente CLCV (Consommation Logement et Cadre de Vie) le 7 mai dernier. La plainte de l’UFC-Que Choisir concerne aussi deux distributeurs, la FNAC et Auchan.
Le 27 mai 2003, l’UFC-Que Choisir a annoncé dans un communiqué qu’elle souhaitait "en finir avec les protections techniques abusivement installées sur les CD". L’association reproche aux maisons de disque d’avoir installé, sur leurs CD, des systèmes de protection qui, d’une part, empêchent la lecture de leurs produits sur certains appareils (ordinateurs, auto-radios CD, lecteurs de salon, etc.) et, d’autre part, empêchent toute copie privée.
De son côté, la CLCV a elle aussi indiqué, le même jour, qu’elle avait déposé plainte contre trois maisons de disque, pour les mêmes raisons. "Les audiences sont en cours et nous ne voulions pas communiquer avant de connaitre les décisions de justice, explique Frédérique Pfrunder, chargée de mission à la CLCV. Mais, suite à l’annonce de l’UFC-Que Choisir, nous avons décidé d’annoncer nous aussi que nous avions porté plainte contre des majors. En force, nous avons plus de chance de gagner."
"Cette technologie n’est pas mûre"
Face aux plaintes déposées par la CLCV, les maisons de disque n’ont toutes pas réagi de la même façon. Sony, qui a récemment décidé de ne plus sortir de CD munis de ces systèmes, mais qui n’a pas retiré les CD protégés de Céline Dion et de Shakira du marché, a souhaité négocier avec la CLCV. Des discussions entre la maison de disque et l’association sont en cours.
EMI et BMG n’ont pas contacté la CLCV. EMI, "qui souhaite maintenir une politique ferme en matière de protection de ses produits", selon Frédérique Pfrunder, attend la décision du tribunal après l’audience de ses représentants. Le tribunal a fixé la date de l’audience de BMG à fin juin.
Pour attaquer les majors en justice, la CLCV a choisi un angle d’attaque bien précis : le manque d’information figurant sur les emballages des CD. "C’est une façon d’obtenir l’interdiction de ces systèmes, qui aboutissent à tromper les consommateurs, indique Frédérique Pfrunder. Car si nous condamnons le manque d’information figurant sur les CD, nous n’approuvons pas pour autant ces systèmes. Nous estimons en effet que tant que la technologie n’est pas suffisamment mûre pour autoriser trois, quatre ou cinq copies privées, et tant que les CD ne sont pas lisibles sur tous les lecteurs disponibles sur le marché, le consommateur est dupé."
Un angle d’attaque qui peut influencer les juges en faveur des associations de consommateurs. "Dans la mesure où aucun emballage de CD ne mentionne la liste exhaustive des matériels sur lesquels ils ne sont pas lisibles, ces protections peuvent être assimilées à l’introduction volontaire d’un vice caché qui s’effectue au mépris des consommateurs, précise Sébastien Canevet, juriste spécialiste des questions Internet. Juridiquement, c’est tout à fait défendable. Politiquement aussi, car les plaintes sont déposées par des représentants de consommateurs. Ces associations ont donc de fortes chances de gagner devant la justice."