Le moratoire qui exemptait les entreprises Internet américaines de certaines taxes expire. Aïe.
La fête est finie. C’est en substance ce que le Sénat américain vient de signifier aux entreprises Internet en refusant, jeudi 18 octobre, de prolonger le moratoire qui les exemptait depuis 1998 de s’acquitter de la plupart des taxes. Pris dans la psychose de l’anthrax, les Sénateurs n’ont pas réellement eu le temps de voter la proposition de loi qui étendait l’exception fiscale Internet pour trois années supplémentaires, pourtant. Résultat : à partir de dimanche 20 octobre, les ...tats américains peuvent obliger les e-commerçants qui vendent sur leur territoire sans y être implantés à collecter et à reverser la TVA. Pire, ils peuvent mettre en place des taxes d’accès locales sur les connexions Internet, du type de celles qui pèsent déjà sur les lignes téléphoniques.
Joyeux bordel
Cet épisode rappelle surtout une vieille vérité : la fiscalité en ligne est un joyeux bordel. Face à ce casse-tête et dans le souci d’être clément face à une industrie jeune et prometteuse, le législateur avait jusqu’ici tout simplement repoussé le problème à plus tard. À ce jour, la TVA sur les transactions en ligne est théoriquement acquittée, par le consommateur lui-même, dans le cas où il achète à un marchand qui ne se trouve pas dans son ...tat. Dans les faits, aucun gouverneur n’a cherché à trouver un système qui permette de repérer et de collecter ces revenus. Avec la fin du moratoire, les choses devraient changer : les juridictions locales peuvent imposer des taxes sur les accès Internet qui devraient peser sur les fournisseurs d’accès. Ce qui devrait augmenter le prix des connexions de 10 à 15 %, selon le New York Times. Par ailleurs, les ...tats veulent exploiter la fin du moratoire pour obliger les sites d’e-commerce à leur verser la TVA sur les ventes qu’ils effectuent hors de leur ...tat d’origine. Aspirateurs.com, dont le siège est dans le Missouri, reverserait donc la TVA collectée au Maryland pour tout aspirateur vendu à un consommateur de ce bel ...tat.
Coup fatal
Les nouvelles règles du jeu sont déjà contestées. Pour les opposants, la fin du moratoire va porter un coup fatal à l’industrie technologique, en permettant à 7 600 juridictions fiscales tels qu’...tats, comtés et villes de collecter des taxes selon leurs propres règles, à des taux différents. Pour être partout en conformité, les sites d’e-commerce devraient se saigner à blanc pour mettre en place des systèmes compliqués. Les dotcoms réclament donc que le moratoire soit rétabli, au moins jusqu’à ce que les procédures fiscales soient simplifiées et harmonisées. Pour les partisans de la taxation du commerce électronique, la décision du Sénat met fin à une injustice qui pénalise les bons vieux commerçants offline et fait perdre aux ...tats des centaines de millions de dollars à l’heure où les efforts sécuritaires post-11 septembre font exploser leurs budgets. Dans le débat en cours, on distingue déjà la concurrence qui risque de s’instaurer entre les ...tats. Certains décideront sûrement d’avoir une politique plus laxiste pour attirer les sociétés high-tech, d’autres pourraient être désertés par les dotcoms parce qu’ils imposent des taxes importantes. C’est un argument que lesdites entreprises reprennent, en pointant déjà les risques de délocalisation qui pourraient avoir lieu hors des ...tats-Unis, vers des pays plus cléments. Dans tous les cas de figure, le changement sera long à devenir une réalité concrète. Une révision de la loi fiscale sur la vente par correspondance serait d’ailleurs en cours. Internet, lui, apprend avec amertume que les privilèges ne sont pas éternels. Dur, dur de ne plus être un bébé.