Ce qui fut longtemps – et reste encore – une affaire de droits de l’homme n’est plus, aujourd’hui qu’un business comme un autre. Pour cause de non rentabilité, NAI vient donc de décider d’arrêter son logiciel de cryptographie PGP.
Alors que GnuPG, un logiciel de cryptographie forte, librement utilisable par les particuliers et les professionnels, est pleinement disponible sous Windows depuis peu, Network Associates (NAI) vient d’annoncer ce jeudi qu’elle cessait de développer PGP (Pretty Good Privacy), le tout premier, et le plus usité, des logiciels de cryptographie, ainsi que Gauntlet, son firewall. NAI continuera d’assurer le support client, mais n’améliorera plus le noyau dur de son logiciel : le chiffrement de messages et fichiers. Une partie des produits de sécurité développés par la division PGP, tels que le firewall personnel, le détecteur d’intrusion, le réseau virtuel privé (Virtual Private Network), sera intégrée à deux autres des divisions de NAI, McAfee (un éditeur d’antivirus) et Sniffer (un outil de surveillance et de management des réseaux). Ironie de l’histoire, ce sont justement ces outils-là de PGP qui furent critiqués par les cryptographes indépendants, pour qui les dernières versions de PGP ressemblaient de plus en plus à une "usine à gaz" à mesure qu’on lui rajoutait d’autres fonctionnalités de sécurité. NAI a finalement décidé de sacrifier l’un des logiciels les plus réputés qui soient, dont l’histoire a profondément marqué le développement de l’Internet. La société a, par ailleurs, annoncé qu’elle cherchait un repreneur pour PGP et Gauntlet, tout en annonçant le licenciement de 250 personnes sur 3 500.
+ 25 % à la bourse
"Network Associates is back’ ("NAI est de retour") s’est ainsi exclamé George Samenuk, le patron de NAI, qui avait été nommé en janvier dernier, à la suite de mauvais résultats financiers, et de la démission de plusieurs dirigeants. Selon l’agence Reuters, l’action aurait en effet gagné, de ce fait, plus de 25 % en un jour, rejoignant son niveau de novembre 2000, avant que NAI ne se lance dans ses restructurations. NAI venait d’annoncer une perte de 11,3 millions de dollars sur le troisième trimestre 2001, pour un revenu consolidé net de 209 millions – contre respectivement 4,1 millions de gain et 238,7 millions de revenus pour la même période l’an passé. "Je me suis engagé, il y a neuf mois, à ramener cette société vers le profit tout en mettant l’accent sur les consommateurs à tous les niveaux de notre organisation", déclarait ainsi Samenuk, qui prévoit une économie, en 2002, de 50 millions de dollars, mais semble oublier les centaines de milliers d’utilisateurs de PGP. La division PGP comptait pour 7 à 9 % des revenus de NAI : si l’utilisation commerciale de PGP était soumise à l’obtention d’une licence, le logiciel était disponible gratuitement en téléchargement. La série d’attentats aux ...tats-Unis a par ailleurs replacé la cryptographie, et PGP en particulier, à la une de certains médias, d’aucuns cherchant à associer terrorisme et cryptographie. Phil Zimmermann, le créateur de PGP, qui avait quitté la société suite à des désaccords de fond cette année, avait alors réitéré qu’il ne regrettait rien, bien au contraire, du fait qu’il s’agit d’un "outil au service des droits de l’homme". Tel ne semble pas être l’avis de NAI, qui note que le ver Nimda, tout comme les attentats, ont bel et bien contribué à relancer ses activités, de la même manière que le marché de la sécurité profite à plein du climat actuel de paranoïa. Alors que la cryptographie...