Un journaliste indépendant américain, Brian McWilliams, a piégé, mercredi 5 février, le magazine en ligne ComputerWorld et des experts en sécurité informatique : se faisant passer pour un militant islamiste, il a revendiqué la création du virus SQL Slammer.
Spécialisé dans les nouvelles technologies, McWilliams, 43 ans, a collaboré, entre autres, pour Salon.com et Wired.com. Son canular était destiné à déterminer, explique-t-il sur sa page personnelle, "si la vérité est la première victime en cas de cyberguerre".
En mars 2002, McWilliams avait racheté le nom de domaine www.harkatulmujahideen.org, laissé à l’abandon par un véritable groupe islamiste basé au Pakistan. Objectif, selon lui : recueillir les e-mails envoyés au site par des internautes et dénicher, par le biais de ce "pot de miel", des informations sur l’activisme internet des radicaux musulmans. Soucieux du détail, l’imposteur a poussé la supercherie jusqu’à mettre en scène une fausse attaque de son site par de pseudo-internautes patriotes.
Correspondant uniquement par e-mail, McWilliams, utilisant le pseudo Abu Mujahid, a récemment contacté des journalistes, leur laissant entendre que le groupe Harkat-ul-Mujahideen était l’auteur de SQL Slammer. Ce ver qui s’attaque aux serveurs Microsoft a défrayé la chronique en engorgeant le réseau internet ces dernières semaines. Le canular fonctionne et le magazine informatique américain ComputerWorld publie l’information le 5 février 2003 sur son site. Avant de la démentir le lendemain dans un long mea culpa.
McWilliams est un habitué des affaires "sensibles". En octobre 2002, il avait réussi à obtenir des mails d’internautes adressés à Saddam Hussein sur le site officiel du gouvernement irakien, www.uruklink.net. Un an plus tôt, un contact lui avait déjà permis d’écouter une conférence téléphonique d’un organisme officiel américain chargée de la sécurité du réseau. Une infiltration qui, selon certains participants, avait entravé le travail des experts.
Interrogé par Transfert sur sa conception de la déontologie, McWilliams justifie sa démarche : "Je pratique un journalisme d’investigation agressif. Je pense que les enquêtes en sous-marin sont souvent un outil de valeur. Mais je ne déforme jamais les faits, à la différence de certains journalistes qui critiquent ma déontologie".
Sur son propre site, l’auteur du canular admet cependant éprouver des regrets : "C’était une erreur. L’expérience montre le danger d’exercer le métier de journaliste à partir d’informations puisées sur Internet." En effet.