Un médecin britannique a mis au point une boîte noire destinée à enregistrer les gestes et les conversations des chirurgiens pendant leurs interventions.
Cette boîte noire ressemble à celle qu’on trouve dans les avions, mais elle est destinée aux salles d’opérations. Inventée par Ara Darzi, un médecin britannique spécialiste de la simulation et de la réalité virtuelle, professeur de chirurgie au London’s Imperial College, la première "boîte noire chirurgicale" serait, selon le New Scientist, dotée de nombreuses fonctions. Elle permettrait tout d’abord d’enregistrer les gestes effectués par le praticien, au moyen d’une série de capteurs électromagnétiques ou à ultrasons placés sur ses mains. Le système permettrait aussi de lister l’ensemble du matériel utilisé, d’enregistrer les conversations du personnel présent et de contrôler les personnes qui entrent ou qui sortent de la salle pendant l’opération. Ara Darzi, qui s’est empressé de faire breveter son invention, espère obtenir des aides de la part du gouvernement britannique pour installer son appareil dans un maximum d’établissements. Mais avant de devenir riche, l’inventeur doit convaincre les principaux intéressés : les chirurgiens, les patients, éventuellement les pouvoirs publics et les spécialistes du droit médical.
Blagues pendant l’opération ?
Car on imagine aisément que ces enregistrements seront, en cas de litige entre un patient et un praticien, toujours disséqués et souvent contestés. Par les compagnies d’assurance notamment. "Les enregistrements de conversation peuvent constituer non pas une preuve, mais un commencement de preuve qui doit être complété par d’autres éléments, indique Rémy Fekete, avocat au cabinet Gide Loyrette et Nouel. On pourrait par exemple démontrer, à l’aide de cette boîte noire, que le personnel médical racontait des blagues pendant une opération... De toute façon, c’est souvent la conjonction des gestes d’une équipe qui conduit à une erreur médicale, et j’ignore si cet appareil se montrera capable de rendre compte du mouvement de l’infirmière qui laisse tomber ses ciseaux sur le corps du patient, ou celui de l’anesthésiste qui se trompe en manipulant l’appareil respiratoire." Du côté des chirurgiens, l’appareil ne sera pas forcément bien perçu. D’autant plus que certains praticiens proposent déjà des méthodes comparables, et sans doute aussi fiables, à leurs patients. "Il suffit de filmer les opérations, précise le docteur Victor Cohen, chirurgien esthétique. Certains de mes collègues italiens le proposent déjà à leurs clients. C’est aussi simple, et c’est moins pénible que de supporter des capteurs au bout des doigts pendant qu’on opère."