Tu me fends l’hacker...
Les trois quarts des Français n’ont aucune idée de ce qu’est un hacker. Un sondage publié par powow.net met à jour ce que M. Tout-le-monde connaît sur ce mystérieux personnage.
Savez-vous ce qu’est un hacker ? A cette question, 75 % des Français répondent par la négative.Commandé par powow.net, un sondage Ipsos rappelle que l’univers du hacking est opaque. Intéressant : à la question trois - il y en a sept - est introduit le terme "
pirate informatique" et cette fois, les réponses sont beaucoup plus affirmées. 12 % seulement des sondés choisissent de ne pas se prononcer si on leur demande de définir un pirate informatique.
Un bug dans la traduction
|
Pirate
a le même sens en anglais qu’en français. Le terme de hacker,
par contre, n’a pas d’équivalent dans la langue de Voltaire. Traduire
hacker par pirate, commodité de langage fort prisée des
médias francophones, entraîne souvent des contresens et fait
opportunément le lit de ceux qui veulent voir dans l’Internet un
espace de non-droit truffé de cyberdélinquants. L’agence
de presse Reuters annonçait ainsi récemment, sur son fil
d’actu américain, que des hackers avaient cassé un code
de cryptage. Traduit en VF par la filiale française du média,
les hackers en question se voyaient affublés du qualificatif de
"pirates informatiques". Sauf qu’il s’agissait, en l’espèce,
du rédacteur en chef d’un journal informatique et de professeurs
d’universités on ne peut plus respectables
Incompétence
des traducteurs, absence de terme "officiel" francophone, les
hackers, que d’aucuns qualifient aussi de "bidouilleurs informatiques",
passent ainsi souvent pour des délinquants. À tort :
sans eux, Internet, comme l’informatique, ne seraient pas ce qu’ils sont.(JMM)
|
Cette question de vocabulaire n’a rien d’anodin. La zone est sensible : pirate reste connoté d’un passé peu glorieux. Mais, pour Jean-Pierre Millet, avocat qui s’est fait une spécialité de défendre ces spécialistes des réseaux, les deux termes sont synonymes : "
Le hacker est un navigateur passionné et presque toujours désintéressé. S’il peut lui arriver de braver certains interdits, de franchir les limites, c’est parce qu’il considère que la toile est un espace de liberté." Le grand public n’a pas la même perception. Un tiers des personnes interrogées classe le hacker dans la case "
délinquant", 44 % dans celle "
jusqu’au-boutistes de la technologie". Délinquant, le hacker ? Les services de police n’en sont pas convaincus. Pour le responsable du Sefti (Service d’enquête sur les fraudes aux technologies de l’information), "
il n’y a pas de problème hacker. Il y a des "bons" et des "mauvais", certes. Mais 80 % des intrusions informatiques dans les serveurs d’entreprise sont le fait des salariés de la boîte." Pour lui, le hacker, version chevalier blanc "
met le doigt où ça fait mal, met à jour les défaillances d’un système".
De War Games à la fracture numérique
Sur cette question de définition, les réponses du sondage ont été affinées selon l’âge. Mais bizarrement, les moins de 35 ans rejoignent leurs aînés sur le sujet et les différences sont minimes. "En fait, le tournant se fait plutôt vers la cinquantaine", commente Thomas-Xavier Martin, ex-gendarme, spécialiste de la sécurité informatique . Pour lui, le quidam moyen ne comprend déjà pas comment marche un ordinateur. Alors le hacking... "Dans les années 80, c’était encore pire. Seuls quelques privilégiés avaient accès aux machines et les fantasmes étaient beaucoup plus prégnants. Il y avait une sorte de paranoïa qui a atteint son optimum avec la sortie de War Games", explique-t-il. Ce film, grand succès à l’époque, racontait l’histoire d’un gamin qui rentre dans les ordinateurs du Norad (North American Defense Command)et manque de déclencher une troisième guerre mondiale.
Quinze ans plus tard, le hacker est toujours inconnu pour le grand public. Il existe pourtant une nette différence, sur ce plan, entre diplômés et non diplômés. À la question "Savez vous ce qu’est un hacker ?", 95 % des personnes ayant un niveau primaire répondent qu’elles n’en ont pas la moindre idée. Le chiffre chute à 55 % pour les diplômés de l’enseignement supérieur. Qui a parlé de fracture numérique ?