L’homme a trente ans et dix ans de militantisme communiste derrière lui. Il a vendu l’Huma sur les marchés, refait le monde en réunions de cellule et glandé un peu en fac. En 1995, Franck Mouly met le PCF au parfum du Web et monte Internatif, premier laboratoire d’observation du militantisme et d’Internet.
Pourquoi avoir adhéré au PCF en 1990 ?
La chute du mur a été un déclencheur. Il n’était pas possible pour moi d’adhérer avant : je ne voulais rien avoir à faire avec la barbarie de l’Est. Et puis, je suis de la génération Tapie : jeune, j’étais attiré par l’esprit Golden Boy. (Il hésite)... J’étais presque de droite et j’ai même commencé des études en école de commerce que je n’ai jamais terminées. En fait, j’ai vite été dégoûté par la médiocrité intellectuelle et l’absence d’utopie, de désir de changer la société.
Et en 1995 vous créez Internatif...
J’ai eu cette idée avec Jérôme Relinger, un autre militant. On se posait la question de l’Internet, en pressentant que ça pouvait devenir un champ extraordinaire. Il fallait que le PCF se penche là-dessus et essaye de pratiquer le Réseau. Nous avons proposé cette idée aux dirigeants du parti, de l’Huma, de Regards (mensuel du PCF). Au final, c’est le directeur de Regards qui nous a dit oui. Je me suis installé dans leurs locaux. Au début, je bidouillais pas mal, je me formais avec les moyens du bord. En mai 1995, on a mis en ligne le site de Regards. Ensuite, on a réalisé le site de l’Humanité, de la ville de Nanterre et de certaines sections de la CGT.
Et maintenant ?
Internatif va changer de forme. D’un côté, nous allons créer une association, une sorte de laboratoire d’études, chargée de faire le lien entre les mouvements alternatifs de l’Internet et le PCF. Nous allons également monter une société de droit privé qui continuera l’activité de création de sites et d’hébergement. Sinon, en ce moment, nous mettons en place un réseau de sites locaux pour permettre aux militants de produire de l’information eux-mêmes. Le Web accompagne et aide la mutation du parti qui essaye de s ‘ouvrir et de se démocratiser. C’est aussi un thème de réflexion : ne pas subir la nouvelle économie telle qu’on essaye de nous la vendre. Nous voulons l’inventer, imaginer de nouvelles règles pour que se crée une véritable nouvelle économie.