Le fondateur de MandrakeSoft confirme que les sociétés open source ont du mal à être financées par les particuliers
Est-ce le début de la fin de Linux pour le grand public ? Cette semaine, les éditeurs de deux des trois versions les plus répandues du célèbre système d’exploitation "libre" ont annoncé qu’ils délaissaient le marché des particuliers pour se concentrer sur celui des entreprises. Le leader américain Red Hat ne développera pas de nouvelle version grand public, suspend son service après-vente et, surtout, ses mises à jour de sécurité, entre décembre 2003 et avril 2004. Son PDG déclare même que Windows reste l’environnement le plus adapté pour les ordinateurs personnels... Dans la foulée, l’Allemand Suse, considéré comme le numéro deux mondial de GNU/Linux auprès du grand public, a été racheté par l’américain Novell, qui veut se renforcer dans le domaine des serveurs pros. La démocratisation de Linux marque t’elle un ralentissement ? Depuis leurs créations, les entreprises qui commercialisent GNU/Linux sous la forme de distributions cherchent un modèle économique viable. A contrario des organisations qui, comme Debian, promeuvent Linux sous une optique plus idéaliste, tel que le partage total et gratuit, mais pour des utilisateurs éduqués, les sociétés désirent une accessibilité accrue pour n’importe quel utilisateur. Cette politique n’amène cependant pas les fonds requis par ces sociétés pour continuer à exercer leur activité. Du trio de tête, il ne reste donc que Mandrake Linux, la version créée en 1998 par le Français Gaël Duval. Le jeune trentenaire explique les difficultés économiques que rencontrent les entreprises open source et sa société MandrakeSoft qui, après quelques difficultés économiques, serait profitable depuis janvier dernier.
Pour Gaël Duval, MandrakeSoft, comme ses concurrents, doit se concentrer sur le marché des entreprises (DR)
Lundi, le PDG de Red Hat, dans un déjeuner de presse, a affirmé que GNU/Linux n’était pas adapté pour un utilisateur moyen et que Windows était plus adapté. Etes-vous d’accord avec ce point de vue ?
Gaël Duval : Linux a beaucoup progressé ces dernières années au niveau de la simplicité d’utilisation, et MandrakeSoft y a été pour beaucoup (cette version est considérée comme la plus simple à installer, Ndlr). Il y a quelques années, utiliser Linux voulait dire passer beaucoup de temps à taper des lignes de commandes, alors que maintenant l’utilisation et même la configuration se font exclusivement à la souris, comme sous Windows ou MacOS.
D’un autre coté, il reste un handicap à Linux par rapport à Windows pour un utilisateur lambda, c’est le nombre d’applications grand public disponibles. Elles foisonnent sous Windows mais ce n’est toujours pas le cas sous Linux
pour l’instant. Il en résulte que Linux est maintenant prêt pour une utilisation sur un poste de travail professionnel (avec utilisation de suites bureautiques, etc.), mais pas encore pour une utilisation familiale.
Après l’annonce de Red Hat sur l’arrêt du support de sa version grand public, on apprend que Suse est racheté par Novell et qu’ils vont se consacrer au marché entreprises. Mandrake reste donc la seule société en lice sur le marché des particuliers. Est-ce de bon augure ?
A l’heure actuelle, qui achète des produits et services MandrakeSoft ? La petite ou moyenne entreprise qui a besoin de monter une infrastructure intranet/internet, un serveur de fichiers, d’impression, ou des stations de travail bureautique, par exemple. Il y a aussi les grands comptes qui veulent s’équiper en serveurs et postes de travail et achètent nos produits, de l’expertise et un contrat de support technique. Ce n’est donc pas du tout le particulier, sauf quand il est averti et passionné d’informatique et qu’il souhaite passer à Linux.
En fait, MandrakeSoft est bel et bien sur le marché des petites et moyennes entreprises et des grands comptes, marchés que nous allons continuer à développer. Par contre, nous nous retrouvons seul acteur Linux majeur européen, et ça c’est intéressant pour nous.
MandrakeSoft continuera-t-il, à moyen ou long terme, à faire des distributions pour le grand public, sachant qu’il n’y a pas, aujourd’hui, de réel retour financier sur cette branche ?
Actuellement, MandrakeSoft est rentable sur tous ses produits vendus au détail et nous allons continuer notre stratégie de pénétration du marché des PME grâce à nos solutions Linux plus simples à utiliser.
Red Hat, pour pallier à l’arrêt de son activité grand public, soutient le projet collaboratif Fedora, qui continuera un développement bénévole. Quel est votre point de vue sur ce nouveau venu ? Sur la position de Red Hat ?
Mandrake Linux s’appuie depuis plusieurs années sur le développement communautaire ouvert avec sa distribution-chantier "Cooker". C’est semble-t-il la voie empruntée par Fedora, mais il est un peu tôt pour nous de
commenter un projet qui n’a pas encore sorti une seule version.
Interview de Gaël Duval: "Il manque une logique globale pour soutenir l’industrie informatique" (Transfert.net)
http://www.transfert.net/a8791
Le mail envoyé par Red Hat à ses utilisateurs particuliers, reproduit sur un forum:
http://lists.netsys.com/pipermail/f...
"Red Hat juge Linux immature pour les PC de particuliers" (ZDNet UK):
http://www.zdnet.fr/actualites/tech...
Novell achète SuSE, l’éditeur allemand de Linux:
http://www.zdnet.fr/actualites/busi...
La page personnelle de Gaël Duval:
http://www.indidea.org/gael/fr/
Le site du projet Fedora (Red Hat):
http://fedora.redhat.com/
"Mandrake Linux, c’est quoi exactement?" (Mandrake Linux):
http://www.mandrakelinux.com/fr/con...
"De Gemplus à MandrakeSoft ... Impasses d’une non-politique industielle" (Tems-reels.net, le site du PS):
http://temps-reels.net/article.php3...