Ça grogne chez le fournisseur d’accès gratuit à l’Internet. La CFDT dénonce des conditions de travail inacceptables. La direction jure que tout va bien.
"La CFDT dit stop aux licenciements et aux représailles exercés sur les salariés." La phrase émane d’un tract diffusé, la semaine dernière à Paris, dans les locaux de la Hotline de Free, le fournisseur d’accès gratuit à l’Internet. "Dès que je suis arrivé sur place pour tracter, la direction a appelé les flics. C’est une direction répressive", assène Ali Ben M’Barek, un permanent de la CFDT Postes et Télécommunications. La scène signe un nouvel épisode de la tension qui règne dans l’entreprise. Une tension présente depuis le mois d’octobre 2000, selon Ali Ben M’Barek, quand la direction a changé. Jusque là, chez Free, il y avait une hotline, partie intégrante de la société. Mais depuis, Free a créé une nouvelle structure, Centrappel, pour reprendre les activités de la hotline. Pourquoi ? "Free voulait stopper ces activités de service clientèle", explique Angélique Dilscher, présidente du conseil d’administration de la nouvelle entité, installée dans les même locaux. Au prix de quelques problèmes de droit du travail : on ne transfère pas aussi simplement des salariés d’une entreprise à l’autre. Impossible, en effet, de faire passer les 28 personnes en contrats de qualification (pour 35 contrats à durée indéterminée) sous un autre chapeau. Une telle proportion de contrats précaires mobilise aussi la CFDT. Justification de la direction : "C’est normal. Toutes les hotline procèdent ainsi." Puis : "À la fin de leur contrat de qualification, on les embauche toujours en CDI." C’est de l’exploitation, rétorque, de son côté, la CFDT.
Grève sans préavis
Direction et syndicats s’accordent pourtant sur deux points : les horaires, jusque là tournants, sont devenus fixes depuis le premier février ; les salaires mensualisés sont désormais calculés sur une base horaire. La direction présente ces changements comme des avancées sociales : "Depuis mon arrivée, les conditions de travail ont été améliorées", énonce Angélique Dilscher. Pas d’accord !, rétorque la CFDT : "Pour les salariés, le calcul mensuel était plus intéressant et les horaires de travail ont été imposés sans négociations." Ce que la direction réfute. La situation a dérapé en janvier dernier, le 13 exactement. C’était un samedi et le groupe qui devait assurer la permanence ce jour-là décida, sans préavis, une grève. "Nous n’étions pas d’accord avec un certain nombre de décisions (horaires, etc..), explique l’un des salariés, licencié depuis. La direction n’a jamais voulu nous recevoir pour en discuter. Pour nous faire entendre, nous en sommes arrivés à cette extrémité qui nous a coûté cher."
D’autres points de litige
Angélique Dilscher s’offusque. Selon elle, la porte a toujours été ouverte. N’empêche, le 17 janvier, quand cinq des personnes déjà en grève le 13 janvier, renouvellent leur refus de travailler, la direction fait venir un huissier de justice. Disproportionné ? "Pas du tout quand des salariés empêchent l’activité de la société", réfute la direction. ...chec d’une politique de ressources humaines ? Non, encore : "Ce mouvement, c’est un phénomène de groupe." Un peu léger comme explication. Selon Ali Ben M’Barek, le délégué CFDT, cinq personnes ont été licenciées depuis ce 13 janvier "pour avoir refusé de prendre leur poste". Conséquence : "Nous allons attaquer aux Prud’hommes", annonce-t-il. Qu’ils attaquent, répond en substance Angélique Dinschler, nous avons de quoi prouver notre bonne foi. Dans la foulée, le syndicat soulève d’autres points de litige. Prime du dimanche supprimée, puis rétablie sous la pression, refus du dialogue, répression anti-syndicale. Faux, tout faux, répond l’autre bord. Angélique Dilscher perd son calme : "Nous avons voulu impliquer les salariés dans la restructuration de l’entreprise. Manifestement, ce n’était pas la bonne solution."