Il est un des hommes les plus riches du monde. Et pourtant son nom est inconnu du grand public. Paul Allen est le co-fondateur de Microsoft. Et après des années de discrétion, il revient en force.
Tous les ans, le classement de Forbes ou de Fortune le sort de l’ombre. Paul Allen est le troisième homme le plus riche du monde. Mais la plupart des Européens continuent à ignorer son nom. Lui, le fan de Jimi Hendrix (il lui a même construit un musée, à Seattle). Lui, le propriétaire de l’équipe de basket de Portland (les Blazers, bonne équipe) et du club de foot de Seattle (les Sea Hawks, plus moyens...). Lui, le quatrième investisseur du studio DreamWorks de Steven Spielberg... On ne le connaît pas ! Et pourtant, tout le monde connaît son copain d’enfance, son meilleur ami : celui avec qui, il y a 25 ans, il a monté une petite société, à Albuquerque. Oui, tout le monde connaît son pote Bill, mais le grand public ne sait pas que Microsoft a été créé par deux associés. Bill et Paul. Gates et Allen.
Il faut dire que pendant vingt ans Paul est resté discret. Camouflé derrière sa barbe épaisse et ses lunettes modèle Sécu, il se contentait d’apparaître sur le banc de son équipe de basket (il faisait venir ses copains de Seattle, dans son Boeing 757 privé, jusqu’à Portland). Il se baladait avec sa guitare, pour faire des bœufs dans toutes les soirées organisées par des sociétés qu’il détenait. Cool, Paul. Très cool. Et il a ses raisons : au début des années 80, il apprend qu’il a un cancer. Il décide alors de profiter de la vie et des dollars que Microsoft lui apporte sur un plateau : superbe maison, plus chère que celle de Bill Gates, à Seattle, yacht de 50 mètres... Et quand il investit, il se permet quelques folies : ainsi quand il lance Intervall Research Group, avec un budget de plusieurs centaines de millions de dollars de budget, il ne donne qu’une seule consigne : "Vous avez cinq ans pour m’inventer quelque chose de nouveau." Les meilleurs cerveaux de la Silicon Valley voulaient en être...
Câble contre satellite : un pari à plusieurs milliards de dollars
Mais Paul va mieux. Il est guéri. Il s’est rasé la barbe, a coupé ses cheveux, et s’habille désormais en costume (même ses lunettes sont acceptables). Et il continue à investir : en quelques mois, Paul Allen, qui reste le second plus gros actionnaire de Microsoft (merci pour lui), est devenu l’un des barons du câble et de l’Internet aux ...tats-Unis. En 16 mois exactement, il a acheté des entreprises (Marcus Cable, Charter Communications, Go2Net, Falcon Communications, Bresnan Communications, Allegiance Telecom...) dont la valeur totale dépasse les 25 milliards de dollars. Son pari : qu’Internet haut débit passe, aussi, par le câble. L’amusant est que Bill, son meilleur ami, a, pour sa part, fait le pari du satellite. Qui va gagner ? Le pari est à plusieurs milliards de dollars.
Au-delà des aspects économiques, le retour de Paul Allen est symbolique : la plupart des Nerds travaillant dans l’industrie informatique rêvent de prendre leur retraite à 30 ans, fortune faite. Paul Allen, lui, revient au boulot après des années de retraite. Certes, il continue à refuser les entretiens et à fuir la presse. Mais il est de retour. Et on ne peut s’empêcher de suivre son parcours avec une certaine sympathie : son combat contre le cancer, bien sûr, mais aussi sa passion pour Jimi "Hey Joe" Hendrix. Chez cet homme au visage sérieux, on sent que la vie est, avant tout, faite pour s’amuser intensément. Et qu’il vaut mieux avoir des remords que des regrets.
Le regret que pourrait avoir Allen ? Celui de s’être fâché, en 1994, avec Steve Case, le patron d’AOL. Allen avait, alors, vendu les 25% qu’il détenait dans la société, multipliant par trois son investissement de départ. Il aurait tout de même dû attendre un peu : ce qu’il a vendu 90 millions de dollars, en 1994, vaut aujourd’hui 24 milliards. On ne peut pas refaire, à chaque fois, le coup de Microsoft...