Davos et Porto Alegre présenteront deux visages de la mondialisation. Les décideurs politiques et financiers se retrouvent aujourd’hui dans le petit village suisse. De l’autre côté de l’Atlantique, au Brésil, le monde associatif se réunit pour la première fois autour du Forum social mondial. Entre les deux, le Réseau, notamment...
Le premier n’est lisible qu’en anglais. L’autre se décline en quatre langues. Les deux sites parlent mondialisation, mais pas de la même façon. Tant sur la forme que sur le contenu, tout oppose le site de Davos et celui du Forum social mondial. D’un côté, donc, Davos et ses cravates. Un petit village suisse où se retrouvent du 25 janvier au 30 janvier, chefs d’entreprises et politiques venus discuter globalisation du monde. De l’autre, Porto Alegre et ses milliers de représentants du monde associatif. Une ville du Brésil qui accueille pour la première fois un "Forum social mondial" (FSM) aux mêmes dates que le Forum économique mondial de Davos. Le comité d’organisation - plusieurs associations brésiliennes - veut montrer ainsi que la mondialisation proposée par Davos n’a rien d’inéluctable. L’ambition ? Créer "un nouvel espace international pour la réflexion et l’organisation de tous ceux qui s’opposent aux politiques néolibérales et construisent des alternatives pour donner priorité au développement humain".
Le choix du lieu est symbolique. Porto Alegre est une municipalité de gauche, engagée dans la démocratie participative et capitale d’un ...tat, le Rio Grande do Sul, considéré comme un laboratoire social. Un exemple pour beaucoup d’organisations gauchistes. Pour participer aux débats et exposer leurs points de vue, plusieurs associations françaises ont délégué des représentants à Porto Alegre. Les plus riches en ont aussi envoyé en Suisse pour participer à la contre-manifestation organisée entre Zurich et Davos. Problème : comment faire communiquer les militants anti-mondialisation d’un côté à l’autre de l’Atlantique ? "Nous ne sommes pas très sûrs d’avoir assez de temps pour s’envoyer des mails. On se servira plutôt des sites d’information pour se tenir au courant", explique Laurent Jesover, webmaster d’Attac (Association pour la taxation des transactions financières). Avec une autre militante, il part pour Davos vendredi, ordinateur sous les bras, pour assiter à des conférences à Zurich, le vendredi, et prendre part à la contre-manifestation prévue samedi matin (et pour l’instant interdite) à Davos.
À l’opposé d’un débat d’idée
Neuf militants d’Attac seront présents au Brésil. Si tout se passe bien, ils devraient mettre en ligne quotidiennement, et en trois langues, l’actualité du forum social. L’Agence multimédia d’information citoyenne a, elle, envoyé une militante, caméra au poing pour diffuser son et images régulièrement sur informationcitoyenne.org. Après les sommets de Seattle, Prague et Nice, le réseau sera une nouvelle fois au centre du système d’information mis en place par certaines associations, habituées à diffuser et échanger sur la Toile. "Internet peut permettre de décloisonner une manifestation comme Davos en diffusant un maximum d’informations vers l’extérieur, confie Jean-Phillipe Joseph, militant, qui participe à la coordination de la contre-manifestation de Davos. Ce contre quoi nous luttons à Davos, c’est aussi le fait que ce soit un Forum privé, complètement fermé à l’extérieur. À l’opposé d’un débat d’idées permettant des échanges réels."
Information contributive
Le site d’Indymedia France, créé le 30 juin dernier lors de la mobilisation de soutien à José Bové à Millau, publie les témoignages provenant des militants. "Nous ne faisons pas du journalisme, mais de l’information contributive", précise Gilles Klein, resté à Paris pour mettre en ligne les différentes contributions. À la veille de l’ouverture du forum économique mondial de Davos, le site relayait les premières infos, notamment celle concernant un bus de militants refoulé à la frontière Suisse... Sur le site du Forum social, même principe. Une coordination de journalistes mettra en ligne des informations et une partie du site sera ouverte à l’ensemble des participants présents à Porto Alegre. Apôtre du libre échange mondial, le Forum de Davos n’a bizarrement pas choisi la même démarche : seule la rubrique "La phrase du jour" est ouverte aux participants. Jeudi 25 janvier, c’est une phrase de Pierre Sané, secrétaire général d’Amnesty International, qui avait été retenue : "Je crois que c’est dans l’intérêt des affaires de voir les droits de l’homme protégés." Comme quoi, le libéralisme a aussi une conscience.