Les femmes préfèrent les hommes qui ont une grosse voix, car elles les imaginent plus séduisants. Mais elles se trompent complètement, comme le montre une étude scientifique.
 Julien Chambaud |
Les grands baraqués sont des stentors, et les maigrichons des faussets. Ce lieu commun est une contre-vérité : il n’y a aucune relation entre le timbre de voix d’un homme et sa morphologie. Pourtant, beaucoup y croient. Et surtout les femmes, comme vient de le souligner une étude scientifique.
Sarah Collins, une biologiste spécialiste du comportement, en a fait l’expérience à l’Institut des sciences de l’évolution et de l’écologie à Leiden (Pays-Bas). Désormais à l’université de Nottingham (Grande-Bretagne), elle a publié ses résultats dans le journal scientifique Animal Behaviour, repris sur le site de Nature, sous le titre "Men’s voices and women’s choices".
Elle a enregistré les voix de 34 hommes et les a fait entendre à des femmes, en leur demandant, à chaque fois, d’imaginer l’apparence des cobayes masculins. Pour que le test soit aussi fiable que possible, les hommes ne prononçaient qu’une série de voyelles (afin de minimiser les effets de langue ou de palais qui, chez certains, ne sont pas des plus élégants). À l’unanimité, les femmes ont imaginé que les hommes avec les voix les plus graves étaient plus costauds, plus vieux et plus chevelus. Et plus séduisants que les autres.
Un effet culturel
Or, la scientifique a mesuré la taille des cobayes mâles et leur taux de testostérone, et elle n’a trouvé aucune relation entre ces données et le timbre de voix des volontaires. La voix n’est donc pas un indicateur biologique fiable de la "masculinité" d’un homme. Ce qui est vrai pour les singes ne l’est pas pour les hommes, chez qui la formation du son est plus complexe. La seule caractéristique morphologique liée à une voix grave est le poids : les barytons et les basses sont en général plus corpulents que les autres. Mais de là à dire qu’ils sont plus séduisants... "Les résultats laissent supposer qu’il peut y avoir une sélection sexuelle des femmes en fonction de la voix, les voix graves étant privilégiées", conclut la scientifique. Pourquoi les femmes se trompent-elles à ce point ? Peut-être parce qu’elles recherchent chez un homme des caractéristiques vocales éloignées des leurs. Ou, plus probablement, parce qu’elles sont influencées par un environnement culturel qui tend à considérer les voix graves comme plus masculines.