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: Il y a eu le MP3, les graveurs de CD et de cédéroms.
On voit maintenant apparaître le piratage du
DVD... Comment faire pour préserver les droits
d’auteur ?
- La question a été posée par
l’ensemble des producteurs de contenu, dont l’industrie
musicale. Au-delà de la lutte contre la contrefaçon
et les vendeurs de copies illégales, ils ont
souhaité remettre en cause la notion de copie
privée. Je rappelle qu’il s’agit d’une exception
légale au droit d’auteur, qui permet de dupliquer
une uvre protégée pour un usage
privé, à condition de ne pas en faire
commerce. Le numérique se distingue de l’analogique
de deux façons. D’une part, il permet d’obtenir
des clones parfaitement identiques. D’autre part,
les copies sont beaucoup plus faciles que dans le
cadre analogique. En informatique, on télécharge
sans cesse des documents sur son disque dur. De plus,
la duplication sur un graveur permet de transférer
des quantités d’information sans commune mesure
avec ce qu’on fait sur une cassette. C’est pourquoi
les producteurs de contenu ont demandé que
l’exception de copie privée ne puisse s’appliquer,
sans l’autorisation expresse des ayants droits.
Quels
sont les enjeux de cette limitation du droit de
copie privée ?
- Un problème risque de se poser avec l’autorisation
de copie des jeux vidéo. En effet, il s’agit
de logiciels de loisirs. Or les logiciels, tout
en étant régis par le droit d’auteur,
dérogent à la règle de l’exception
de copie privée. C’est un système
de licence pour les producteurs : on vous autorise
à stocker le logiciel sur votre micro, on
vous permet de faire une sauvegarde, et éventuellement
à le copier sur votre ordinateur portable.
Mais il faut racheter une seconde licence pour installer
cette application sur un deuxième ordinateur
de bureau, même s’il vous appartient personnellement.
Si l’autorisation de copie privée s’appliquait,
cela donnerait probablement lieu au paiement d’un
supplément financier. Dans ces conditions,
percevoir une rémunération en échange
du droit de dupliquer un logiciel, alors qu’il n’existe
pas de droit de copie privée, signifierait
qu’on autorise les gens qui paient à piller
! Toutefois, les vendeurs de logiciels ne pourront
pas forcément limiter la contrefaçon.
Un tel système leur permettrait au moins
d’engranger une petite compensation
Il faut
donc se poser plusieurs questions avant de mettre
en place l’autorisation de copie privée.
Primo, est-elle souhaitable ? Secundo, comment fonctionnerait-elle
? Tertio, quel est son sens économique ?
Si le niveau de la compensation est trop élevé,
la copie devient aussi chère que l’original,
et le droit de copie privée disparaît.
Quelle
est la position des pouvoirs publics sur ce thème
?
- Cette question est examinée dans le cadre
de la directive européenne Droits d’auteur
et droits voisins dans la société
de l’information, actuellement en discussion. Nous
devrons ensuite la transposer dans la législation
française. Cela se fera probablement dans
le cadre de la loi sur la société
de l’information. En attendant, les opérateurs
français, dont les producteurs de musique,
ont demandé le droit de prélever une
"redevance pour compensation".
La commission qui a déjà organisé
les systèmes de redevance pour la copie privée
analogique a donc commencé à travailler
sur le numérique depuis la fin de l’année
dernière.
Comment
ça marche ?
- Quand vous photocopiez, à usage privé,
un ouvrage, une redevance est perçue sur
le photocopieur ou l’imprimante laser. Il en va
de même pour les cassettes vidéo. Les
sommes perçues sont réparties entre
les auteurs, les producteurs, les artistes interprètes.
Ce sera la même chose dans ce cas-là.
Où
en sont les travaux de la commission ?
- Ils ne font que commencer. La commission devra
déterminer un mode de calcul du montant de
la redevance, et surtout décider à
quel niveau elle serait perçue. Sur les ordinateurs
? Sur les enregistreurs-graveurs ? Ou bien sur les
supports amovibles vierges ? Taxer les disques numériques
enregistrables pose un problème d’assiette.
Car avec la cassette audio, on savait que les copies
se faisaient majoritairement au détriment
de l’industrie musicale, et avec la cassette vidéo,
de la télévision et du cinéma.
Le fléchage des supports analogiques était
simple. Mais le numérique a un usage universel.
Si je grave sur un CD vierge tous mes travaux littéraires
et administratifs, je n’ai pas forcément
envie de payer une redevance pour compensation aux
producteurs de musique. Il ne faudrait pas imposer
exagérément l’industrie informatique.
De toute façon, à terme, les mesures
à prendre dépendront du contenu de
la directive européenne Droits d’auteurs
et droits voisins dans la société
de l’information.