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9/08/2001 • 16h28

Le fabuleux destin d’I2BP (4/4)

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CHAPITRE IV : L’INVENTION DU SIÈCLE PR...SENT...E AU MONDE ENTIER

Marc-...ric Gervais est shooté à l’euphorie. Face à un visiteur, il se laisse aller : «  On nous a dit : pour la vidéo, vous êtes face à Berkeley et le MIT ; pour le son, vous êtes face à Fraunhofer.  » Avant de verser dans le polar : « Nous apportons une solution au piratage du MP3. I2bp, c’est du streaming réel, avec effacement des données dès la diffusion. Je ne connais que deux groupes capables de cracker notre technologie : les Russes et le Mossad. Le Mossad nous cracke en cinq jours, mais ça reste complètement entre nous. » Le 22 janvier 2001, i2bp annonce officiellement sa technologie à la presse. Tout en émettant des réserves, Transfert.net réagit le premier et publie un article alors assez enthousiaste intitulé « i2bp : la technologie qui peut révolutionner Internet ». Il suffit de 2 kilooctets pour passer 25 images par seconde, en plein écran et avec le son : c’est la télé sur Internet en qualité VHS avec un simple modem 28 k ! Une prouesse qui changerait également la face de la téléphonie mobile en permettant de regarder des films sur les futurs portables UMTS... Dans son bureau fonctionnel, Jean-Yves Charron en fait des tonnes, gribouillis à l’appui : « Pendant des années, il y avait la technologie d’un côté et les contenus de l’autre. Pour la première fois, nous réconcilions la technologie et ce que les gens veulent, l’image et le son. » Combien vaut i2bp ? « À un milliard de dollars, je pense que nous sommes très en dessous de la valeur de la technologie », assure, sans sourciller, Marc-...ric Gervais, une Marlboro à la main.

Protection très rapprochée

Mais comment jouer un coup aussi gigantesque lorsqu’on est un moucheron ? L’Adi décide de ne pas commercialiser lui-même la technologie i2bp. Son président établit le scénario de la vente de la société aux industriels. « Un cabinet spécialisé, raconte Charron, déterminera, une heure à l’avance, le lieu de nos rencontres. On ne sait jamais. Vous savez, avec 2 000 francs d’équipements, on peut écouter facilement tout ce qui se dit dans une pièce. » Le prix de vente doit être fixé en un tour d’enchères. Selon Charron, à la mi-avril au plus tard, tout sera réglé. En attendant, le « trésor » est sous bonne garde. Le soir, des aboiements rompent le silence des locaux de l’Atelier. Un maître-chien précédé de son molosse fait sa ronde dans les couloirs déserts. Les développeurs ont été envoyés au vert dans une villa de Deauville. « Là-bas, c’est Fort Knox, ils sont barricadés », jure Charron. Une escouade de gardes du corps surveille effectivement les étudiants. Ils peuvent appeler leurs parents, mais ne doivent surtout pas dire où ils sont. Un autre étudiant de Supinfo, Guillaume N., a rejoint l’équipe. Le président de l’école s’aperçoit de son absence, convoque immédiatement les parents de tous les étudiants et invite Philippe Fourcade à venir s’expliquer. Ce dernier, pour amadouer les parents, se contente de leur promettre des parts de l’affaire. Le responsable de l’école convoque alors les étudiants. Ils arrivent accompagnés de gardes du corps. L’entrevue est crispée. Les étudiants veulent bien se présenter aux tests hebdomadaires pour ne pas gâcher leur année... mais toujours avec les gardes du corps. L’école refuse.

L’annonce faite à la presse

Pendant ce temps, la presse défile dans le bureau de Charron. Quand on lui demande pourquoi il fait une annonce officielle alors qu’il ne peut encore rien montrer, Jean-Yves Charron passe la main dans ses cheveux blancs et prend un air grave : en rendant publique i2bp, il empêcherait les militaires d’utiliser leur droit de préemption sur la technologie (une pratique courante, selon lui). « Ce truc-là, c’est une bombe, s’étrangle-t-il. Nous avons touché la limite du format MPEG, nous avons ni plus ni moins inventé une norme. » Calé dans son fauteuil, les yeux brillants et la voix forte, le quinquagénaire se rêve en Alexandre numérique : « Je lance un défi à Bill Gates. Il y aura un compte à rebours : la démonstration en ligne d’i2bp, le 15 mars, sera calée sur l’ouverture du Nasdaq. Bill Gates va négocier avant pour pouvoir annoncer, le jour du lancement, que la technologie lui appartient. Pendant que mon site de démonstration pètera, dix journalistes du monde entier seront sélectionnés, avec une connexion chacun, et ils commenteront en direct ce qu’ils verront.  » Dans la foulée, Charron promet le lancement d’une plate-forme de retransmission d’événements sportifs, Wysis - What You See Is Sport -, une filiale de l’Atelier de l’Innovation. Richard Bunn, un ancien de l’Eurovision spécialiste des droits télévisés, est nommé consultant pour Wysis. En fait, il passe occasionnellement à l’Atelier et assiste à quelques rendez-vous, en particulier chez TF1. Bizarrement, Marc-...ric Gervais, lui, se fait de plus en plus discret. Il n’assiste plus aux entretiens et refuse catégoriquement d’être pris en photo.

Technologie invisible

Si elle ne calme pas les médias, la surenchère d’i2bp finit par intriguer les grands industriels. Inquiets, railleurs, ou faussement indifférents, ils envoient discrètement leurs émissaires à Charron, qui les accueille à bras ouverts, quand il ne sollicite pas lui-même les entrevues. La liste comporte une trentaine de noms, ceux des principaux groupes de technologies et de télécommunications du monde. Bertelsmann, Microsoft, Sun, France Télécom, Bouygues Télécom, Canal+ Technologies, Oracle, Intel, Real Networks, Alcatel, Thomson Multimédia et Sagem y figurent en bonne place. Les entretiens ne font qu’ajouter à leur frustration. « Nous n’avons pas pu évaluer leur solution dans des conditions scientifiquement acceptables, dit-on chez Canal+ Technologies, la branche R&D du groupe Vivendi Universal. Aujourd’hui, nous n’avons pas d’avis sur eux, ni favorable, ni défavorable. » Même attentisme prudent chez Microsoft et Real Networks. D’autres sont plus expéditifs. « Alors qu’ils prétendent avoir inventé une nouvelle méthode de compression, on a décelé des défauts traditionnels du codage MPEG. Ça fait beaucoup rigoler dans le milieu... », indique un spécialiste de France Télécom. « Lors de la démonstration sur un PDA iPaq, que je connais bien car j’en possède un, j’ai vu des statistiques qui semblaient indiquer qu’on était plutôt à 200 ou 300 kilooctets par seconde qu’à 2, ajoute un autre interlocuteur. Je n’ai rien dit sur le coup. On a proposé un protocole de test, mais ils ont refusé. On l’a vite compris : il n’y a rien. »

Embrouilles et retards

Pour ne pas être submergés, les responsables d’i2bp brouillent les pistes, grâce à des moulinets d’explications confuses, parfois contradictoires. Gervais affirme, par exemple, à un journaliste de 01net. que son player tient en à peine 50 octets, avant de se rétracter. Lui aussi attaqué, Charron se défend comme il peut : « La technologie est sous contrôle, je ne me suis pas fait rouler par Gervais. De toute façon, c’est Munoz qui mène le bal. » Inaccessible pour la presse, Michel Munoz, le directeur scientifique de l’Adi, est la caution technologique d’i2bp. N’est-il pas, selon Charron, diplômé de Polytechnique ? Son nom ne figure pourtant pas sur l’annuaire des anciens élèves de l’X. À la mi-février, i2bp propose à quelques journalistes et industriels de fournir des vidéos tellement compressées qu’elles doivent leur parvenir sur une simple disquette. Manque de chance, l’équipe est « débordée », les disquettes n’arriveront jamais. Heureusement, la démonstration en ligne du 15 mars tient toujours. L’équipe doit être présentée, la veille, à la presse internationale, dans un prestigieux hôtel de la Place Vendôme, à Paris.

D’annulation en annulation

Patatras, le 13 mars, tout est annulé, la conférence de presse comme la démonstration. Dans un communiqué lapidaire, i2bp annonce un report sine die. Prétextant un lynchage médiatique, la société se mue en camp retranché et communique au compte-gouttes. Pour tenir la position, Charron se fait expert juridique. Le report des opérations tiendrait à des problèmes de dépôt de brevets : « Les mômes ont travaillé par modules et on n’a pas pu les arrêter. Du coup, quand on a fait le bilan, on a vu que les nouveaux développements ne figuraient pas dans les brevets qui ont été déposés. Aujourd’hui, il n’y a plus rien que je fasse sans que les avocats et les banquiers me disent ce que je peux dire ou pas. » Interrogés par les journalistes, plusieurs spécialistes balaient l’argument. Selon un juriste, le brevet revient, en Europe, au premier qui dépose la technologie. Aux ...tats-Unis, au premier inventeur. Surtout, le dépôt de brevet en France ouvre automatiquement un délai de priorité de douze mois dans le monde. Ensuite, l’inventeur dispose d’un an pour déposer les extensions à l’étranger. Charron vacille sur ses fondations, mais ne cède pas. Il refuse aussi de donner le nom de ses conseils.

CHAPITRE V :RETOUR SUR TERRE

Des gros bras patrouillent toujours dans les couloirs d’i2bp. À la mi-juin, il n’y a pourtant plus grand monde à protéger. Au sixième étage, dans une ambiance morose, Hervé C., l’étudiant, et Michel Munoz, le directeur scientifique, sont dans l’impasse. En l’état, la « technologie i2bp », remaniée à plusieurs reprises, est équivalente à ce que savent faire les pros du secteur. Concrètement, l’équipe n’a rien de ce qu’annoncent ses dirigeants. À la manière d’un médecin militaire, Charron a disséqué le reste de l’équipe. Première victime : Marc-...ric Gervais. Qui affirme, lui, avoir quitté l’Atelier de l’Innovation pour des raisons personnelles et feint, à mots choisis, l’entende cordiale avec son ancien protecteur : « Je prie tous les jours pour lui, pour sa famille et pour l’ensemble de l’Atelier de l’Innovation. » « Dégoûté » par l’expérience, il ne veut plus entendre parler de vidéo en ligne. Il conserve cependant des parts dans l’affaire. Il aurait tort d’en vouloir à Jean-Yves Charron. Si Marc-...ric a pu vendre 16 % de ses parts dans i2bp, pour la coquette somme de 3,2 millions de francs, c’est grâce au patron de l’Atelier : l’acheteur, l’Envol NSP, est une société détenue majoritairement par un certain Charron Jean-Yves et sa famille... La société a été créée le 5 février 2001, le jour même de la cession de parts, dans l’euphorie suivant l’annonce faite aux médias. Du côté des étudiants, Guillaume N., a repris les cours à la mi-mars après plusieurs mois de « stage » chez i2bp. Son camarade Ivan F., lui, est paumé. Il n’a pas reçu de lettre de licenciement et Charron lui aurait demandé de vendre ses parts dans i2bp. Le chèque tarderait à arriver. Au début de l’été, la possibilité d’une action en justice est évoquée.

Jusqu’au-boutisme

Des broutilles pour Charron. Le président de l’Adi affiche un moral de vainqueur. Il est vrai qu’en avril, l’Atelier de l’Innovation a réalisé un joli coup en levant 27 millions de francs. « Nous avons été sollicités par quatre ou cinq entités de capital-risque pour entrer à notre capital. Nous avons décliné », crâne Julien Hervet, directeur juridique et administrateur de l’incubateur. Surtout, Charron refuse d’admettre l’échec d’i2bp, repoussant sans cesse la « vraie démonstration ». De mars à mai, puis à juin. Le 23 mai, contacté par Transfert.net, il lâche : « Vous tombez bien, on a tout terminé aujourd’hui, à 14 h 30 ! J’étais en voiture avec mon chauffeur quand je l’ai appris, et j’ai hurlé à la fenêtre sur un kilomètre. » Les brevets ont été déposés et il prépare logiquement son annonce. Mais il veut choisir le meilleur le moment. Nous demandons un rendez-vous. Il se crispe, finit par accepter, mais renvoie vers son agence de relations presse, Wellcom, pour gagner du temps. L’attachée de presse évoque un possible report à septembre, l’été étant, paraît-il, peu propice aux annonces fracassantes... Un mois plus tard, il faudra se contenter d’une rencontre avec le directeur juridique de l’Adi. Qui n’a rien à ajouter.

*Lorsque seule l’initiale du nom est indiquée, il s’agit d’un personnage dont nous avons modifié l’identité.

...PILOGUE
Alick Mouriesse, le président de Supinfo, est inquiet. Début juin, il a reçu un appel à l’aide de Hervé C., qui voulait des conseils sur son avenir. Mouriesse décide de contacter Jean-Yves Charron pour avoir des explications. Le patron de l’Adi parle avec détachement des étudiants : « Cette expérience leur sera utile et puis ce n’est pas ce qui va changer quelque chose à ma vie. Moi, j’ai monté 16 sociétés en deux ans. Ça leur servira d’expérience, croyez-moi. » Il assure encore qu’il finira bien par « sortir la techno », puis lâche, comme pour se rassurer : « De toute façon, i2bp ou pas, ça ne changera pas ma crédibilité. » Les vrais génies ne doutent jamais.
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