Loïc Damilaville, directeur associé de sosdomaines.com, conseille les entreprises sur leurs stratégies de nommage. Il suit donc de très près la procédure de sélection des nouvelles extensions menée par l’Icann. Interview.
Transfert - D’ici décembre, de nouvelles extensions vont voir le jour. Peut-on parler de fin du ".com" ?
Loïc Damilaville - Il est encore beaucoup trop tôt pour le dire. Pour l’instant, c’est plutôt un pari. Si ces extensions sont suffisamment explicites et médiatisées, l’internaute pourra s’y retrouver. Mais s’il y a profusion sans règles précises, les gens se dirigeront plutôt vers ce qu’ils connaissent bien, c’est-à-dire les ".com" ou les ".fr". Je pense que le ".com" va rester encore longtemps l’extension de référence. Même les navigateurs l’ont enregistrée par défaut. Si vous tapez Gan, par exemple, votre navigateur vous conduira automatiquement vers Gan.com.
Qu’est ce que ça changera pour la visibilité des entreprises sur le Net ?
Il faudra élaborer des stratégies adaptées et même des stratégies de veille. Par exemple, sur les extensions qui n’intéresseront pas directement l’entreprise, mais sur lesquelles elle ne peut pas se permettre de subir des piratages ou des nuisances (du type gan.sex). Autre difficulté, la longueur des extensions. Jusqu’à aujourd’hui, on se contentait de deux lettres, pour le géographique, ou de trois lettres, là on va avoir des extensions de 5 à 6 lettres. Il va aussi falloir réfléchir aux adresses pour qu’elles restent mémorisables et accessibles intuitivement. Ce qui suppose de nouvelles stratégies de référencement.
Cette multiplication des extensions va t-elle entraîner une multiplication des litiges ?
Oui, certainement. Le cybersquatting sera plus répandu et plus facile. On voit d’ailleurs apparaître un autre phénomène aux ...tats-Unis. Des petits malins déposent des marques du type sex.web ou business.biz et espèrent en tirer de beaux bénéfices lorsque ces extensions seront validées par l’Icann. Il faudra donc être beaucoup plus vigilant. Mais à priori les procédures de règlement devraient se simplifier. Le danger réside peut-être dans l’excès inverse : donner trop d’armes aux sociétés et freiner l’expression individuelle. La balance entre liberté d’expression et protection des marques risque d’être difficile à établir.
Pour vous, la multiplication des extensions est dangereuse ?
Le cœur du problème n’est pas le nombre d’extensions, mais la possibilité de déposer un nom de domaine sans justifier de son activité. À l’image du ".com", véritable fourre-tout. Ceux qui comptent gérer les nouvelles extensions sont là pour faire de l’argent. Il est plus rentable, pour eux, de disposer d’un système automatisé peu coûteux acceptant tous les noms de domaines. S’équiper d’un système de vérification nécessitant une intervention humaine leur reviendrait beaucoup plus cher et serait plus long à mettre en œuvre.