Guerre des prix ou enchères UMTS, les opérateurs allemands de téléphonie mobile ont englouti des milliards de marks pour gagner des parts de marché. Aujourd’hui, ils tentent de faire payer le consommateur. Mais, avec l’UMTS, une nouvelle guerre des prix se profile.
"Nous devons arrêter d’habituer toute une génération à obtenir gratuitement nos téléphones portables", déclarait récemment Uwe Bergheim, le président de E-Plus, l’un des principaux opérateurs allemands de téléphonie mobile. Fini les subventions au téléphone portable ! Sur ce point, tous les opérateurs allemands s’entendent. Dans les mois à venir, les alléchantes offres d’achat, à moins de 350 francs, d’un portable et un avoir téléphonique et ceci sans payer d’abonnement, devraient disparaître des rayons.
Appareils vendus à perte
Un virage radical par rapport à la stratégie en vogue au cours de l’année 2000. Tout au long de l’année dernière, T-Mobil (Deutsche Telekom), D2 (Mannesman), E-Plus ou Viag-Interkom, se sont livrés à une chasse aux clients sans précédent. Le résultat est impressionnant. En 12 mois, le nombre de clients a doublé : aujourd’hui, près de 50 millions d’Allemands ont un portable. Cependant, les entreprises du secteur ont dû dépensé des milliards de francs en publicité et ont largement subventionné des appareils souvent proposés à perte. En moyenne, chaque téléphone portable aurait ainsi bénéficié d’une "subvention" de 1 000 francs. À cela s’ajoute la folie des enchères UMTS allemandes qui ont coûté près de 54 milliards de francs à chacune des six entreprises "victorieuses". Enfin, l’effondrement des cours boursiers a réduit bien des espoirs à néant. T-Mobil, la filiale de téléphonie mobile de Deutsche Telekom avait beaucoup investi dans la préparation de son introduction en Bourse. Celle-ci a été annulée et repoussée sine die.
Mauvais clients
Pour les opérateurs téléphoniques, l’heure du bilan a sonné. Et celui-ci est plutôt sombre. Première constatation, la plupart des nouveaux clients gagnés l’année dernière ne sont que des utilisateurs occasionnels. En effet, les utilisateurs "rentables" ayant choisi un contrat à long terme sont équipés depuis longtemps. Par ailleurs, 70 % de ces nouveaux clients ont opté pour une offre associant téléphone portable et cartes rechargeables dotées d’un avoir téléphonique. Le problème, c’est que la carte est trop rarement rechargée pour que l’offre soit rapidement rentable. Ceci, sans tenir compte du fait qu’il n’est pas rare qu’un client préfère s’acheter un nouveau modèle de portable plutôt que de recharger sa carte. Enfin, près de 10 % des clients sont dits "dormants" : ils n’utilisent presque jamais leur téléphone.
Autre inquiétude : le trafic grandissant de téléphones portables entre l’Europe de l’Ouest et les pays de l’Est. Selon Inga Churashova, responsable marketing de Motorola pour la Russie (citée par Heise Online), presque deux tiers des appareils vendus en Russie seraient des importations illégales venues de l’Ouest. Une affaire qui affecte évidemment, en premier lieu, les opérateurs téléphoniques qui achètent les téléphones au prix fort chez les constructeurs. Ces derniers entendent eux aussi empêcher cette pratique. Un groupe de travail réunissant Motorola, Alcatel, Nokia, Siemens, Philipps, Samsung et Panasonic a été créé au début du mois de mars pour lutter contre ces importations illégales.
Une nouvelle guerre des prix sanglante
Moroses, les fabricants de portables commencent à économiser sur les coûts de personnel et de production. En début de semaine, la division de portable de Siemens qui emploie 8 000 salariés a déclaré qu’elle ne renouvellerait pas les contrats à durée déterminée de 2 000 personnes. Il serait également question de concentrer la production sur un site au lieu de trois actuellement.
L’époque des cadeaux aux clients est donc révolue. Mais pour combien de temps ? L’arrivée prochaine de l’UMTS sur le marché pourrait relancer une sanglante guerre des prix en Allemagne. Certains détenteurs de licences UMTS en Allemagne, comme le groupe 3G (détenu par l’espagnol Telefónica et le finlandais Sonnera), n’ont aucun client en Allemagne. Pour s’installer sur le marché, il leur faudra donc acquérir rapidement des parts de marché et pour cela, casser les prix.