Après plusieurs semaines de rumeurs persistantes, le patron de Telefónica, Juan Villalonga, a quitté ses fonctions. Retour sur le parcours de l’ex-président du géant espagnol des télécommunications.
"Afin d’agir au mieux pour la société et ses actionnaires, le conseil d’administration de Telefónica et Juan Villalonga estiment que le moment est venu de changer de président." Le texte du communiqué de presse diffusé mercredi 26 juillet par Telefónica est laconique. Après quatre années passées à la tête de la plus grande entreprise espagnole, Juan Villalonga sort par la petite porte. Il est remplacé par César Alierta, président de Altadis, société née de la fusion de la Seita et de Tabacalera.
L’échec, il y a quelques semaines, de la fusion de l’opérateur espagnol avec son homologue hollandais KPN et une enquête ouverte par l’autorité boursière espagnole pour délit d’initié ont sonné le glas de celui qui fût le premier président d’une entreprise publique nommé par le nouveau gouvernement de centre-droit de José María Aznar en 1996, son ami d’enfance. ...lèves du collège El Pilar à Madrid au milieu des années 50, les deux amis ne se sont jamais quittés malgré des carrières professionnelles différentes. En politique pour l’un, dans la banque pour l’autre - Juan Villalonga a dirigé le groupe Bankers Trust. Sa nomination en tant que neuvième président de Telefónica est apparue comme une véritable faveur. Inconnu du grand public à l’époque, Villalonga n’était pas considéré comme un spécialiste des télécommunications. En quatre ans, il a tout de même achevé la privatisation de l’opérateur (l’...tat possédait encore 21% du capital à son arrivée), assuré le développement international de l’entreprise, fait entrer Telefónica dans la nouvelle économie (avec la filiale Internet Terra notamment) et l’a transformé en un groupe multimédia à part entière, avec des participations dans de nombreuses radios, télévisions ou journaux. Il a également mis en place le système des stock-options, a placé des hommes de confiance aux postes clés et a réduit le nombre d’employés d’un tiers environ. Son ambition personnelle semblait en parfaite harmonie avec celle du gouvernement, jusqu’à il y a quelques mois, où il est devenu persona non grata chez les instances dirigeantes du pays. Un retournement radical.
En route pour le Real Madrid ?
La fusion ratée avec KPN et une enquête pour délit d’initié en ont fait la bête noire de son "ami de 30 ans" José María Aznar. En mars dernier, suite à la victoire du Partido Popular (PP) aux élections législatives, Aznar crée un ministère des Sciences et Technologies. Un poste sur mesure pour Villalonga, mais c’est Anna Birulés, patronne du principal concurrent de Telefonica, qui devient ministre. C’est le début de la fin pour Villalonga. L’homme accumule les "casseroles" qui font les choux gras de la presse espagnole. Il aime le luxe, ne se prive pas de voyages en jet privé pour dîner au Quartier latin ou à Rome avec ses amis. Il déménage à Miami, où il s’installe avec sa nouvelle compagne, quelques semaines à peine après avoir divorcé. Adriana Abascal, veuve du patron du puissant groupe mexicain Televisa, Emilio Azcárraga (El Tigre), vient de lui donner une fille. Elle vient aussi de toucher l’héritage de son défunt mari : près de 170 millions de francs. Si on ajoute les 200 millions de francs d’indemnités de Juan Villalonga, le couple ne devrait pas avoir trop de problèmes pour survivre. Et l’ex-wonderboy a sûrement une idée de reconversion. Son autre ami d’enfance, Florentino Pérez, vient d’être nommé président du club de foot du Real Madrid, dont il est un fervent supporter. Villalonga qui, enfant, rêvait de porter le maillot blanc du club de la capitale, pourrait bien enfiler dans peu de temps la tenue de dirigeant de ce club de foot. Un retour aux sources en quelque sorte...