Le Conseil économique et social a présenté mardi en séance un rapport sur le haut débit qui prône une intervention publique ambitieuse.
"Ce n’est pas un changement, c’est une révolution !" Mardi 12 juin, le rapporteur André Marcon chantait les louanges du haut débit à la tribune du Conseil économique et social. "La qualité des connexions est primordiale. Elle n’est pas une condition suffisante pour le développement des territoires, mais elle est une condition nécessaire", a-t-il insisté. La vénérable institution n’a pas cédé aux sirènes de la dotcomania hier. Résultat, elle résiste aujourd’hui à l’e-krach, avec ce rapport intitulé Haut débit, mobile : Quelle desserte des territoires ?
Plaidoirie pour la fibre optique
La section des économies régionales et de l’aménagement du territoire du Conseil en a fait une plaidoirie en faveur du câblage en fibre optique de toutes les communes de France, la fibre étant "la technologie la plus sûre, la plus évoluée, et que l’on peut adapter le plus rapidement à l’accroissement des besoins", selon le rapporteur. Il faudra commencer par faire l’état des lieux des kilomètres de fibre optique déjà installés, en général le long des voies navigables ou bien des lignes de chemin de fer. Aujourd’hui, ces infrastructures ne sont pas recensées. Bien entendu, André Marcon ne néglige pas les autres canaux du haut débit. Pour faciliter l’arrivée de l’UMTS, il faudra d’abord compléter la couverture GSM, et puis mutualiser les pylônes afin que les opérateurs y installent leurs antennes. Les nouveaux protocoles de transmission par satellite, qui permettront d’augmenter les débits sortants, sont à suivre de près.
Un job pour l’...tat
Quant à la réalisation, la puissance publique doit jouer un rôle prépondérant : "Nous demandons que l’...tat soit maître d’œuvre de la cohérence et de la coordination dans la construction d’infrastructures disponibles sur tout le territoire, et au meilleur coût." La construction et la gestion des infrastructures doit être déléguée à un opérateur unique ; l’exploitation sera réalisée par plusieurs opérateurs concurrents. L’idée est de rééditer les efforts spectaculaires de la France à l’époque où elle était en retard sur ses voisins pour le téléphone : le réseau le plus moderne du monde a été bâti en l’espace de dix ans ! La même exigence doit présider aux grands travaux : pour le Conseil, les technologies de l’information et de la communication relèvent du service universel.
Vers les 100 méga
André Marcon propose comme objectif un seuil minimal de 2 Mbits/s, mais aussi une infrastructure évolutive, qui permette d’anticiper sur les débits de 100 Mbits/s qu’il prévoit pour l’avenir. "Ça a peut-être l’air complètement exagéré. Mais ça ne l’est pas. Le Canada a déjà décidé d’équiper tous les foyers en fibre optique à 1 Mbit/s d’ici à la fin 2005 !" Il préconise aussi le principe de l’abonnement forfaitaire permanent à un coût maximal de 20 ou 25 euros (130 à 165 francs) par mois. Il critique l’attitude de l’opérateur semi-public : "Le discours de France Télécom consiste à dire : montrez-nous les besoins, et on développera les infrastructures. Je ne suis pas d’accord. C’est de l’usage que viendront les besoins." Saine réflexion. "L’enjeu est colossal. Mais là où il y a une volonté, il y a un chemin", conclut le rapporteur en citant Alain. Pourvu que cet avis du Conseil économique et social soit écouté, en ces temps de libéralisation, de net-scepticisme, et d’offres commerciales pour le haut débit hélas peu concluantes.