C’est la guerre entre les juges américains et leur administration de tutelle qui a décidé de soumettre leurs ordinateurs au flicage. On en arrive même, aujourd’hui, à des échanges peu amènes via journaux interposés
Est-ce qu’il faut exercer une cyber-surveillance des employés travaillant dans les Cours de justice ainsi que des juges eux-mêmes ? C’est la question, fortement combattue par nombre de magistrats américains, que devait aborder mardi 11 septembre, la « Judicial Conference ». Cette haute instance administrative des cours de justice, composée de 27 juges fédéraux et présidée par un représentant de la cour suprême, étudie, en effet, la mise en place d’un règlement précisant les conditions de cyber-surveillance des employés des juridictions. Ce règlement a été rédigé durant l’été, à l’initiative du comité chargé des questions technologiques, le « judicial conference automation and technology ». Lequel s’est positionné à la demande du bureau administratif des cours de justice (administrative Office Of US Courts) dont le directeur, Leonidas Ralph Mecham, est un farouche partisan d’une surveillance stricte des habitudes électroniques de ses employés.
Les juges contre la cybersurveillance
Le problème c’est que les 30 000 salariés et surtout les 1800 juges fédéraux concernés par la question envisagent d’un très mauvais œil ce cyber-contrôle de routine. Déjà en août, la publication de la recommandation par l’administration judiciaire, s’était heurtée à la vive protestation des juges fédéraux. Les juges de la cour d’appel de San Francisco avaient même organisé une mini insurrection durant l’été, obligeant les informaticiens à désinstaller les logiciels de filtrage, chargés sur leurs postes de travail à leur insu. En effet, depuis avril les ordinateurs sont soumis à contrôle. C’est d’ailleurs pourquoi, l’administration judiciaire cherche aujourd’hui à régulariser la pratique en faisant adopter une recommandation sur le sujet. Mais voilà, s’il est facile pour les entreprises privées d’imposer un certain contrôle à leurs employés, dont la capacité de contestation reste restreinte, dans le secteur public la chose est déjà moins aisée. Surtout lorsque la plupart des juges, regroupés au sein de la « Federal Judges Association (qui représente 85% de la profession), s’opposent à ce qu’ils considèrent comme une « invasion de leur vie privée au travail ».
Sites porno accessible aux magistrats
À la tête de cette opposition se trouve, le juge Alex Kozinski de la cour d’appel de San Francisco, qui a publié le 4 septembre une lettre ouverte à ces confrères sur le thème de : « la vie privée en procès ». Dans cette missive, le magistrat interpelle directement le directeur de l’administration judiciaire. Leonidas Ralph Mecham _ c’est lui_ y est accusé de surveiller les communications des juridictions alors même que la « Judicial Conference ne l’y a jamais autorisé ». Leo répond à ces accusations en déclarant, dans le journal Newsfactor que « le juge Kozinski montre un peu trop d’intérêt à laisser les sites pornographiques accessibles aux magistrats ». Cette guerre ouverte entre les juges et l’administration n’a, pour l’instant, abouti à aucune décision définitive. En attendant, les employés des juridictions et les juges continuent donc d’être soumis à une cyber-surveillance quotidienne.
Lettre ouverte parue dans the Opinion Journal
http://www.opinionjournal.com/edito...
Article de Newsfactor
http://www.newsfactor.com/perl/stor...
Site de l’association des juges fédéraux
http://www.fedjudge.org/
Site de l’administration judiciaire
http://www.uscourts.gov/