Alors que la banque en ligne peine à s’imposer en France, le cabinet Deloitte Consulting a passé le secteur au crible, à l’échelle européenne. Interrogations sur l’avenir des banques exclusivement en ligne...
"Zebank va devoir atteindre assez vite une masse critique de clients si elle veut survivre ", assène Thierry Faulques, consultant au cabinet Deloitte Touche Tohmatsu. Plus généralement, l’auteur de l’étude " Internet : quelles stratégies pour les banques européennes ? " s’interroge sur l’avenir des pure players, qui proposent au public l’accès à leurs services bancaires exclusivement sur Internet.
Les pure players manquent de clients
De fait, un premier bilan montre qu’en Europe, aucun d’entre eux n’a encore réussi à émerger, à l’exception peut-être du britannique Egg, lancé en 1998, qui compte aujourd’hui près d’un million et demi de clients. En France, ZeBank annonce 45 000 clients après huit mois d’existence, mais au prix d’une stratégie de conquête de clientèle coûteuse, avec une offre tarifaire non rentable. Quant au pionnier Banque Directe, lancé dès 1994 comme banque par téléphone puis progressivement complété par une offre sur Internet, il totalise à peine plus de 100 000 clients. " C’est trop peu, surtout si l’on compare aux 500 000 clients qu’a drainés BNPnet, l’initiative Internet de la maison-mère de Banque Directe ", juge Thierry Faulques. Ce n’est d’ailleurs sans doute pas un hasard si BNP Paribas a récemment annoncé qu’elle gelait ses investissements sur sa filiale de e-banking. " Je ne serais pas surpris qu’elle décide de fondre Banque Directe dans BNPnet, qui bénéficie de la notoriété de sa marque et de la complémentarité d’un réseau bancaire traditionnel ", pronostique le consultant.
Multicanal impératif
Pour lui, adopter une stratégie multicanal, qui allie les canaux traditionnels de la banque (les agences, le téléphone...) et Internet, est d’ailleurs un impératif pour réussir dans la banque en ligne. C’est ce que l’on constate dans les pays scandinaves, il est vrai précurseurs en matière d’Internet (53 % de la population est connectée, contre 12 % en France) : les banques traditionnelles de la région (Nordea, Swedbank, SEB) ont converti entre 20 et 30 % de leurs clients à Internet pour les services à faible valeur ajoutée. Cette stratégie, baptisée par Thierry Faulques stratégie de "l’optimiseur", est d’ailleurs le minimum qui s’impose à toutes les banques traditionnelles : elle permet de réaliser rapidement d’importantes économies sur les coûts de traitement des opérations.
Le cabinet Deloitte Consulting dégage trois autres types d’acteurs susceptibles de connaître le succès dans la banque en ligne : les category killers, spécialisés dans un produit et ultra-compétitifs dans ce cadre ; les nicheurs, spécialisés dans une catégorie de clientèle, de préférence celle des mass affluent, c’est-à-dire les personnes riches et bien portantes ; enfin les "maîtres de l’univers", prêts à conquérir à coup de milliards de dollars une large clientèle, et à se construire une marque forte sur Internet. Quelle que soit la voie choisie, les places seront chères. Deloitte Consulting constate en effet la forte concentration du secteur et prévoit le renforcement de cette concentration : déjà, dans quasiment tous les pays européens, la part de marché cumulée des trois premiers acteurs de la banque en ligne dépasse celle des trois plus grandes banques traditionnelles dans leur domaine. Restera-t-il assez de place pour les banques exclusivement en ligne qui n’ont pas encore une base de clientèle importante ?
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