Quand l’économie du high-tech plonge, que deviennent les immigrés venus pour soutenir la croissance ? La Silicon Valley se pose la question avec insistance. Un Français installé dans la Silicon Valley réagit pour Transfert.
Les messages inondent les forums des médias spécialisés : le sujet de l’immigration devient sensible sitôt que l’économie connaît des ratés. Et la question se pose brutalement : faut-il augmenter ou baisser le nombre de visas H-1B, ces visas liant les émigrés à un emploi donné, surtout dans le domaine des nouvelles technologies ? Le gouvernement fédéral a décidé de délivrer jusqu’en 2003, 195 000 visas H-1B par an. Mais que deviennent les titulaires de ce précieux sésame quand ils perdent leur emploi ? Légalement, les détenteurs auraient entre une et trois semaines pour quitter les ...tats-Unis ou retrouver un emploi, mais en pratique, ils ne sont pas poursuivis.
Trois mois pour se faire supplanter par un américain
Cela ne règle pas leurs problèmes, loin s’en faut. "Il n’est pas évident de retrouver un job dans les nouvelles technos en ce moment, raconte Frédéric Billou, un Français installé dans la Silicon Valley depuis 1994. Le visa est lié à l’entreprise, il faut un nouveau visa pour un nouvel emploi. Mais ce visa n’est accordé que si, 3 mois après publication d’une annonce, aucun candidat qualifié et n’ayant pas besoin de visa, donc américain, ne s’est présenté." Selon Frédéric Billou, la communauté high-tech américaine est partagée entre deux attitudes : celle de réduire le nombre de visas pour les techniciens étrangers ou, au contraire, de l’augmenter.
...ducation ou immigration ?
Ce débat, ZDNet a choisi de le poser noir sur blanc. Avec deux articles : l’un pour la hausse des visas, l’autre contre. Au lecteur de se forger sa propre opinion. Patrick Houston, rédacteur en chef, est pour les visas H-1B. Et son argumentaire est plutôt factuel : la crise va passer et les immigrés, surtout les diplômés, ceux visés par le visa H-1B, ont contribué pour 13 milliards de dollars au PIB. Comme en plus ils sont en bonne santé, avec des taux de criminalité bas, ils coûtent donc peu d’argent à la société. Moins, en tout cas, que ce qu’ils rapportent. Conclusion : ils sont rentables.
David Coursey, lui aussi journaliste à ZDNet, n’est pas d’accord. Il est content d’avoir des amis étrangers et reconnaît que "l’immigration a fait de nous ce que nous sommes" (sous-entendu, la plus grande puissance mondiale). Mais, pour lui, l’immigration a surtout servi à cacher la faiblesse du système éducatif américain. Un système qui produit des jeunes travailleurs supplantés par des étrangers simplement parce que ceux ci sont meilleurs. David Coursey préférerait que les jeunes Américains aient une chance d’être compétitifs et compétents sans avoir à partir faire leurs études à Bombay ou Bangalore. Son second argument est que l’immigration prive de leurs plus grands talents des pays en développement, et donc qui en auraient le plus besoin.
Immigrés contre américains ?
Mais ce n’est pas là le principal sujet de préoccupation des salariés américains qui s’expriment dans les forums. Ils ressentent souvent l’arrivée des immigrés comme une concurrence déloyale. Ils sont cependant favorisés, comme l’explique Frédéric Billou : "En ce moment dans la Valley, il y a abondance de main d’œuvre, donc les boîtes emploient plus facilement ceux qui n’ont pas besoin de visa, car ça limite la paperasse et ils peuvent commencer immédiatement." Ce sont donc les immigrés qui restent sur le carreau. Et ils n’ont même pas la chance d’être électeurs...