À 26 ans, Vincent Van Quickenborne est le plus jeune membre du Sénat belge. Avocat de formation, cet élu de Démocratie intégrale (gauche libérale) a déposé le 20 avril dernier une proposition sur le vote en ligne.
Vincent Van Quickenborne
© Geert Jochems |
Quel est l’état actuel du cadre législatif belge en matière de vote électronique ?
Sur ce plan, la Belgique est bien avancée. La loi du 11 avril 1994 a institué le vote par voie électronique. Désormais, 50 % des électeurs (soit près de quatre millions de citoyens) utilisent ce système pour voter. Les citoyens disposent, dans les bureaux de vote, d’un écran proposant les différentes listes. Ils effectuent leur choix via une carte électronique qui enregistre les votes. C’est cette carte électronique qui est déposée dans l’urne à la place d’un bulletin. Après le succès de ces expériences, il s’agit passer à l’étape supérieure. C’est-à-dire le vote en ligne que nous appelons dans notre proposition de loi "le vote automatisé à distance". Nous avons suivi la primaire démocrate en Arizona qui s’est déroulé en partie sur Internet. Cela nous a conforté dans notre volonté.
Comment défendez-vous cette proposition de loi ?
En Belgique, le vote est obligatoire. Il s’agit donc de faciliter le vote de tous les électeurs, les personnes âgées vivant dans les hôpitaux ou les handicapés, par exemple. Mais aussi la communauté belge expatriée qui compte plus de 300 à 400 000 ressortissants. Ces citoyens ne disposent en réalité que d’un droit théorique. Dans la pratique, il est très compliqué pour un Belge vivant à l’étranger d’exercer son droit de vote. Résultat : seule une dizaine de Belges dans cette situation ont pu voter lors des dernières élections nationales en 1999. En fait, cette proposition de loi fait partie d’un ensemble de propositions dans le cadre d’une refonte globale du système électoral belge.
Vous appartenez à un parti de gauche et, pourtant, vous présentez ce texte avec un député de droite...
Sur certaines questions, le clivage gauche/droite disparaît au Sénat belge. Il s’agit plutôt d’un clivage générationnel. Alain Destexhe qui est membre de la majorité de droite, fait aussi partie de la jeune génération de la classe politique. Les jeunes parlementaires sont plus au fait des nouvelles technologies. C’est la génération des sites Internet. D’ailleurs, j’ai beaucoup de contacts dans le monde de l’Internet en Belgique, des providers aux hackers...
Cette proposition de loi a-t-elle une chance d’aboutir ?
J’estime qu’elle a 50 % de chances d’être votée. L’ambition de cette proposition de loi est d’être effective pour les élections fédérales de 2003. Les premières discussions autour de ce texte auront lieu en octobre 2000 et le vote final est attendu pour fin 2001-début 2002. Un membre du gouvernement, le ministre des Télécommunications, s’est d’ores et déjà prononcé en faveur du vote en ligne des ressortissants belges à l’étranger...
Quelles sont vos pistes de réflexion concernant les modalités d’application ?
Pour le moment, deux solutions sont envisagées. L’une consiste à envoyer un code secret à chaque électeur sur le modèle de ce qui se fait pour les cartes bancaires. Ce code secret, complété par divers renseignements (nom, adresse, numéro de carte d’identité) sera utilisé pour authentifier le vote sur Internet. La primaire démocrate en Arizona s’est déroulé avec ce mode de fonctionnement. L’autre solution existe déjà sur Internet à travers le système des certificats numériques et des autorités de certification qui sécurisent les transactions électroniques. Ce système est le plus fiable sur le plan de la sécurité. Ce sera au ministre de l’Intérieur de définir les modalités d’application si la loi est votée...
Cela ne vous choque pas de voir le secteur privé prendre en charge l’aspect technique d’une élection...
Pour le vote électronique, l’...tat a passé un contrat avec IBM qui a mis en place les infrastructures techniques du système. De toute façon, l’...tat n’a pas les moyens de développer des solutions techniques propres. Le plus important est que les trois points mis en avant dans la proposition de loi sur l’e-vote soient respectés : fiabilité, sécurité et secret. Sans oublier la transparence dans les appels d’offres.
Concernant le vote en ligne, certains dénoncent les dangers d’une certaine fracture numérique entre riches et pauvres...
Selon moi, c’est juste une question de temps. La Belgique est l’un des pays les plus câblés au monde. En Flandres, par exemple, près de 97 % de la population reçoit déjà la télévision par le câble. On peut avancer que dans quelques années cette population disposera aussi d’Internet par ce biais...