Il est (pour le) libre, Mamère...
Les Verts se sont trouvé un nouveau cheval de bataille : la lutte contre le brevetage du logiciel libre. Pour parler de cette épineuse question, Noel Mamère, candidat des Verts aux prochaines élections présidentielles, avait invité Richard Stallman, pionnier du logiciel libre et fervent opposant au brevetage des logiciels, à venir exposer ses idées à Paris le 20 novembre dernier. Visiblement, les deux hommes sont sur la même longueur d’onde.
Pourquoi les Verts s’intéressent-ils brevetage des logiciels ?
Cette préoccupation ne date pas d’aujourd’hui. La question du logiciel libre préoccupe les Verts qui, contrairement à ce qu’on croit, sont très modernes : Ils ne refusent pas du tout les nouvelles technologies, dont ils sont des adeptes forcenés. La question du logiciel libre fait d’ailleurs l’objet d’un chapitre de mon prochain livre, La Fracture humaine. Dans le chapitre intitulé " la fracture numérique ", je fais référence à Richard Stallman. Je m’intéresse à cette question parce que c’est le prolongement naturel du combat que nous menons contre le brevetage du vivant. Derrière le brevetage du vivant, il y a une vaste entreprise d’accaparement de ce que j’appelle les biens communs comme les gènes, la connaissance, la transmission des connaissances, qui font partie des biens communs de l’humanité.
Richard Stallman se déclare totalement opposé au brevetage des logiciels. Et vous ?
Aux Etats - Unis, il y a des intellectuels, comme Stallman, qui résistent aux grands groupes : cette idée me réjouit. C’est rare de voir comment des Américains, même des intellectuels américains, peuvent faire appel à l’Europe avec autant d’énergie. C’est bien la preuve que l’Europe ne sert pas seulement à constituer l’euro, mais qu’elle est aussi un espace politique permettant d’assurer la diversité culturelle (la transmission des connaissances), et donc de se protéger contre les agressions de grands groupes qui ne sont pas simplement américains. Quand Stallman dit " vous avez la possibilité de résister aux brevets informatiques, ce n’est pas une obligation ", il a raison. C’est pourquoi je poserai une question au gouvernement sur la question des brevets européens.
Quelle est cette question ?
Que compte faire le gouvernement français pour supprimer l’office des brevets européens et pour imposer un moratoire sur toute tentative de brevetage informatique ?
L’Europe a-t-elle les moyens de lutter contre des lois comme celle brevetage du vivant, liées à d’importants enjeux financiers ?
Oui. Nous avons déjà obtenu une grande victoire, puisque les tribunaux ont été saisis dans l’affaire des médicaments génériques destinés à l’Afrique du Sud. Bayer a fini par céder, et les médicaments génériques ont pu être utilisés en Afrique du Sud pour lutter contre le Sida. Mais si les derniers accords sur les médicaments génériques votés à l’OMC sont un progrès, ils sont aussi accompagnés de dispositions insupportables. Ils disent " oui aux médicaments génériques ", mais les pays producteurs de médicaments génériques n’ont pas le droit de les exporter. Autrement dit, on signifie aux africains, " vous allez crever, on vous donne les moyens d’éviter de crever, mais vous allez quand même crever la bouche ouverte parce que vous n’êtes pas capables de fabriquer des produits génériques ".
L’Europe peut-elle s’opposer au brevetage des logiciels, contrairement aux Etats - Unis et au Japon ?
Comme nous l’a expliqué Stallman, la question du brevetage des logiciels ne rentre pas dans les accords TRIPS (en français ADPIC, NDLR ) sur la propriété industrielle, signés dans le cadre de l’OMC ( Organisation mondiale du commerce). Rien, vraiment rien, n’oblige à faire entrer dans le cadre du droit commercial ce qui est de l’ordre de la liberté d’expression. Et rien n’oblige l’Europe, et donc les Français, à se soumettre à cette dictature qui consiste à dire que puisque ça existe aux Etats-Unis, on est obligé de le faire en Europe.
Le thème du brevetage des logiciels n’est pas très vendeur pour un homme politique. Ça ne vous pose pas de problème de défendre un tel sujet ?
Le thème de la double peine non plus. Comme ce n’est pas très porteur de se battre contre les lois sécuritaires, qui flattent les Français dans le sens du poil. Mais la question, c’est de savoir quelle est l’idée qu’on se fait de l’action politique. La question du brevetage du logiciel rentre tout à fait dans les idées défendues par les Verts.
Vous avez déjà utilisé Linux ?
Non. Je n’utilise mon PC... qui est un Mac, que pour le traitement de texte, pour écrire mes bouquins. Et je commence à me mettre aux mails. Je suis très en retard. Je suis encore très largement dans la galaxie Gutenberg. Mais ça ne m’empêche pas de m’y intéresser. Comme je suis allé à une rave party, alors que je n’appartiens pas à la culture techno.
http://petition.eurolinux.org/