Hébergeurs : le Sénat joue les durs... pour l’honneur
Lundi 29 mai, le Sénat a durci l’amendement Bloche sur la responsabilité des hébergeurs. Mais l’Assemblée devrait supprimer ces modifications en dernière lecture.
Edgar Pansu |
En deuxième lecture à l’Assemblée nationale (
voir Transfert), l’amendement Bloche sur la responsabilité des hébergeurs avait déjà été durci. Pas suffisamment aux yeux du Sénat qui réexaminait le texte lundi 30 mai. L’amendement adopté par la majorité de droite a modifié la loi sur quelques points :
- Suppression de la "mise en demeure" des hébergeurs par un tiers
Pour éviter aux hébergeurs de crouler sous des récriminations farfelues, Patrick Bloche avait précisé qu’une plainte adressée à un hébergeur devait prendre la forme d’une mise en demeure. Les sénateurs ont abrogé cette précision : les hébergeurs, selon eux, devront réagir "dès qu’ils ont connaissance" du caractère illicite ou préjudiciable d’un site.
- Identification : les hébergeurs responsables si les informations sont fausses.
Dans le texte voté par la gauche à l’Assemblée, l’auteur d’un site Web, tenu de s’identifier auprès de son hébergeur, était passible d’amende et de prison s’il donnait de faux éléments. Les sénateurs ont décidé que l’hébergeur est lui aussi responsable de la véracité des données. Tous deux risquent trois mois de prison et 25 000 F d’amende. Initialement, le montant de la peine était deux fois supérieur. Un amendement socialiste l’a divisé par deux.
- Fournisseurs d’accès et hébergeurs : même combat
Comme dans leurs précédents examens, les sénateurs ont tenu à inclure dans l’amendement les fournisseurs d’accès. Ceux-ci peuvent être responsables des contenus, au même titre que les hébergeurs.
Position gouvernementale
Toutes ces dispositions devraient disparaître lors de l’examen final devant l’Assemblée. Lors des débats au Sénat, Catherine Tasca a répondu point par point aux sénateurs :
Sur la mise en demeure, la ministre estime au contraire que le "mode de saisine [de l’hébergeur] par un tiers et la légitimité des plaintes" pourraient être plus précis.
Sur l’identification : les peines devraient être réduites à néant. Catherine Tasca a rappelé que l’identification des auteurs de sites Web "n’est pas de l’ordre de la sanction mais de la responsabilité". Elle a aussi précisé que les hébergeurs "n’ont pas a vérifier l’exactitude des données qui leur sont soumises".
Sur les fournisseurs d’accès : la ministre a annoncé que l’amendement examiné en dernière lecture à l’Assemblée ne concernerait que les hébergeurs, et ce de façon explicite.
Diligences appropriées
Catherine Tasca a également profité de la séance pour préciser sa version des "diligences appropriées", auxquelles seront soumis les hébergeurs saisis par un tiers (voir article de Transfert). "Il s’agit de vérifier l’existence du contenu en cause, prévenir son auteur ou son éditeur, proposer une mise en contact et indiquer une voie de recours", a expliqué la ministre. Pour Catherine Tasca, il y a des cas où le caractère illicite des sites est indiscutable. L’hébergeur se doit alors d’en interdire l’accès.
Mais que faire lorsque le caractère illégal n’est pas évident ? Rappelant le non-lieu accordé à Multimania, dans l’affaire opposant l’hébergeur à l’Union des Etudiants Juifs de France (voir article de Transfert), la ministre dit faire confiance aux pratiques professionnelles et à la jurisprudence. Encore faut-il que les juges maintiennent le cap.
article de Transfert: Bloche et Tasca, des intérêts divergents
http://www.transfert.net/fr/cyber_s...