Le tribunal de Strasbourg accorde des dommages et intérêts à deux journalistes dont les reportages étaient diffusés sur Internet sans leur accord
Joel Turlin dit avoir attaqué en justice France 3 Alsace "pour une question de principes". Avec son collègue Gilles Chavanel, ce journaliste s’était plaint, en 1998, de ce que leur employeur avait choisi de diffuser leurs reportages sur Internet, sans leur demander leur avis et sans leur reverser de droits d’auteur. Le tribunal de grande instance de Strasbourg leur a donné raison, vendredi 16 novembre. Il a condamné France 3 et la société Plurimedia, partenaire de la chaîne pour la mise en ligne des images, à verser 15 000 francs de dommages et intérêts et 4 000 francs de frais de justice à chacun des deux journalistes, ainsi qu’un franc de dommages et intérêts et 4 000 francs de frais de justice au Syndicat National des Journalistes (SNJ) qui soutenait cette action.
Publication dans un même journal
Les deux journalistes de France 3 avaient assigné la société au moment même où les journalistes du quotidien régional Les Dernières Nouvelles d’Alsace (DNA) intentaient une action pour les mêmes raisons. Et ces derniers avaient obtenu satisfaction. Plus longue à venir, pour des raisons de procédure, la décision sur les reportages télévisés concerne, à la différence des articles des DNA, des œuvres audiovisuelles qui répondent à un droit spécifique. Dans ce cas précis, le tribunal a estimé que les journalistes étaient titulaires de leurs droits dans la mesure où aucun contrat de production audiovisuelle n’avait été conclu avec France 3 pour l’exploitation en ligne des reportages. La chaîne avait l’obligation d’obtenir leur accord et de leur verser une contrepartie financière. Les avocats de France 3 avaient tenté de faire valoir que la mise en ligne des images par la chaîne ne pouvait pas être considérée comme "une publication dans un autre journal". Rappelant que cette publication avait été réalisée sur le site de Plurimedia (filiale des Dernières Nouvelles d’Alsace) et non sur le site de France 3, le juge a estimé que même si elle avait eu lieu "dans un même journal", cela n’aurait pas remis en cause "le principe selon lequel le droit de reproduction est épuisé dès la première publication".