Cette poudre de silicium révèlera, en couleur, gaz toxiques et menaces invisibles
Deux chimistes de l’Université de Californie de San Diego (UCSD), Michael Sailor et Jamie Link ont mis au point un procédé permettant de produire une poussière de silicium dont les grains sont capables de s’assembler, s’orienter et de filtrer la lumière différemment en fonction de leur environnement chimique. Ce sable magique pourrait être utilisé pour détecter la présence de gaz toxiques et de polluants invisibles.

Un film de particules "intelligentes" révélant des gouttes d’huile en suspension (Sailor Group/UCSD)
Les particules fabriquées par les chercheurs Sailor et Link sont des grains de silicium de l’épaisseur d’un cheveux comportant 2 faces polies, poreuses et de couleur différentes. Elles sont fabriquées en brisant, grâce à des ultrasons, une galette de silicium similaire à celles qu’on utilise pour produire puces électroniques et microprocesseurs pour les ordinateurs.
Paint-ball chimique
Chaque face de la galette de silicium est traitée chimiquement de manière à réfléchir différemment la lumière. Ce traitement confère également à chaque face des propriétés physico-chimiques qui lui sont propres. Sailor et Link ont par exemple fabriqué des particules dont une face, rouge, "colle" aux molécules d’eau (hydrophile) quand l’autre, verte, les fuit, et colle aux lipides (hydrophobe). Les chercheurs américains exposent ces travaux dans un article à paraître en septembre dans la revue scientifique Proceedings of the National Academy of Sciences.
Sailor et Link ont pulvérisé leur poussière dans un verre d’eau contenant quelques gouttes d’huile. Les grains, dont la face verte est "attirée" chimiquement par les lipides s’agglutinent alors à la surface des gouttes d’huile, n’exposant ainsi que leur face rouge, hydrophile, vers l’extérieur. Au bout de quelques secondes, la poudre de silicium forme un film continu de couleur rouge (vert à l’intérieur) qui surligne les nappes d’huile en suspension dans l’eau.
Pour les chercheurs américains, cette expérience simple montre le potentiel de la poussière magique. Selon Sailor, on peut donner d’autres propriétés chimiques aux faces de silicium, en modifiant le traitement qu’on leur applique. Les chercheurs comptent rendre la poudre de silicium capable de réagir au contact d’autres types de substances invisibles, notamment les produits toxiques.
La poussière intelligente peut jouer un rôle de révélateur coloré, similaire à celui joué par la poudre "noire" utilisée par les enquêteurs pour relever les empreintes digitales. Mais la technique s’appliquerait cette fois aux liquides et aux gaz, et permettrait de révéler s’ils ont été contaminés par des polluants et poisons comme le benzène, le sarin ou le monoxyde de carbone. Une "intelligence" qui pourrait par exemple servir la protection de l’environnement ou la lutte contre le bioterrorisme.
La présentation des travaux du Sailor Group de l’UCSD sur les poussières intelligentes (avec vidéos et animations):
http://chem-faculty.ucsd.edu/sailor...