En 1979, Raymond Depardon publie dans une petite maison d’édition un bouquin qui va faire date. L’ouvrage s’appelle " Notes " et pour la première fois, le photographe accompagne ses tirages de légendes, commentaires intimes presque des confidences. " Notes ", est mis en ligne mardi 14 novembre sur visuelimage.com.
C’était son premier carnet de route. Après 20 ans de photo-reportage, Raymond Depardon part à Beyrouth, finit en Afghanistan et livre en 1979 " Notes ", un petit bouquin de photos et de confessions. " Une bombe à l’époque, la première fois qu’un reporter laissait place à son émotion. C’est un livre fondateur pour Depardon, son point de rupture avec le photo-journalisme ". Christophe Cartier en a les yeux qui brillent. Á côté de lui, Pascal Nieto, tout aussi disert, termine les phrases et enchaîne sur d’autres histoires. Á deux, ils pourraient raconter la vie du photographe au crâne lisse. Une partie de cette vie est exposée à la Maison européenne de la photographie, à Paris, à partir du mercredi 15 novembre. Une rétrospective des carnets de route, de ces œuvres où Depardon associe l’image et le texte. Pascal et Christophe, eux, diffusent sur visuelimage.com, leur site dédié à la création visuelle, l’intégralité de " Notes ". Ce petit bouquin d’une quarantaine de pages édité en 1979 à 600 exemplaires et introuvable évidemment, sauf sur quelques étagères de collectionneurs.
Périple intime
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L’autorisation de mise en ligne sur Internet, écrite et signée par Depardon, est même punaisée au mur. " Quand on a su qu’il y allait avoir cette exposition, on a eu envie de l’accompagner sur le web. On a proposé à Depardon de diffuser sur notre site son premier carnet. Il a accepté. Il nous a fait confiance. " Quarante pages se déroulent, presque comme un livre, avec les légendes qui viennent et reviennent se coller aux photos. Un périple intime. Depardon parle d’une femme (" J’espère tenir le coup. Je regrette que tu ne sois pas là "), de ses peurs (" J’ai raté une photo aujourd’hui ; je n’ai pas osé "), et de ses doutes. Les photos, en noir et blanc, racontent la guerre, du Liban à l’Afghanistan. Pas d’effets spéciaux, mais une mise en plage simple, " proche du travail réalisé par Depardon. On a essayé de ne pas le dénaturer. "
Carrefour d’univers
Dans leur atelier du 13e arrondissement parisien reconverti en bureau de " start-up culturelle ", entre toiles, poupée rose et photos cloués au mur, Christophe et Pascal, se souviennent de leur première rencontre avec Depardon. Ils avaient 20 ans et lançaient un journal qui voulait révolutionner l’image. " On l’avait baptisé Logie, ça nous a desservi d’ailleurs. Tout le monde croyait qu’on vendait des maisons " Pascal s’esclaffe. " On avait demandé à Depardon de venir nous dire ce qu’il en pensait. Il a discuté une journée avec nous, expliquant que ce n’était pas ça qu’il fallait faire ". Quelques jours plus tard, ils reçoivent une carte postale du maître, une photo de Cartier-Bresson avec cette phrase : " Il faut que le cri sorte ". Logie a vécu pendant trois numéros. " Ensuite, chacun a fait sa route, mais on ne s’est jamais perdu de vue ". Les deux se retrouvent, il y a deux ans avec un projet de site dédié à la création visuelle. " Sans chapelle, précise Pascal, un site vraiment ouvert, un carrefour d’univers. De la photographie à la vidéo en passant par l’art plastique ".
La mise en ligne des photos de Depardon n’est qu’un aspect de leur travail. Mais un bel aspect. Ils ont tenu entre leurs mains un des exemplaires de " Notes ", celui que Depardon leur a confié. Pascal lâche : " Les agrafes étaient un peu rouillées. Ça avait quelque chose d’émouvant. "