Après avoir épuisé en un an trois séries d’émissions Big Brother, l’Allemagne se prépare à déguster Big Diet (le grand régime), une nouvelle spécialité de "Reality TV" hollandaise à la sauce Endemol Production. À partir du dimanche 27 mai, dix candidats trop bien en chair s’apprêtent à vivre 100 jours d’un carême tardif et médiatique. Enfermés dans un pavillon de 500 m2 avec piscine, salle de gym, et pas moins de 45 caméras, ils devront suer sang et eau pour atteindre leurs objectifs hebdomadaires d’amaigrissement. Tous les dimanches, Margaret Schreinemakers, la "Mère Thérésa" de la télévision allemande, viendra à leur chevet. Et, selon la procédure désormais connue, le public pourra goûter au plaisir pervers de l’expulsion du candidat le moins conséquent ou le moins sympathique.
Mission bienfaitrice
Contrairement à Big Brother et à ses avatars européens, 100 % voyeuristes, Big Diet veut travailler pour la bonne cause. C’est ce que soutient en tout cas la rédaction de l’émission : "Nous voulons offrir la possibilité aux candidats et aux téléspectateurs non seulement de changer d’allure, mais aussi de transformer leur existence tout entière." Josef Andorfer, le très altruiste patron de RTL 2, est, lui aussi, convaincu de sa mission bienfaitrice : "Même si nous n’arrivons à aider que 100 000 personnes à se libérer de leur problème de poids, ce sera un succès."
S’attachant à une cible plus âgée que celle de Big Brother, Big Diet dispensera des petits conseils pratiques pour se sentir mieux dans sa peau. Accessoirement, ce sera aussi l’occasion de vendre des journaux, des livres de cuisine ou encore des produits de fitness estampillés Big Diet. En y ajoutant les revenus publicitaires de l’émission TV et du site internet, la chaîne espère ainsi atteindre un chiffre d’affaires de 170 millions de francs pour des coûts de production estimés à 100 millions de francs. Des projections financières qui se basent sur les excellents taux d’audience de la version hollandaise de Big Diet. Celle-ci a démarré en mars dernier et recueille en moyenne 26 % des parts de marché, des taux que même la première série de Big Brother n’a jamais atteints en Allemagne.
...rotisme tiède
Pour RTL2 et la télévision réalité allemande, le succès de cette cure d’amaigrissement télévisée est capital. En effet, grâce à Big Brother, RTL 2, qui était surtout connue pour ses films d’actions et d’érotisme tiède, a réussi à recueillir jusqu’à 21 % de parts de marché là où, auparavant, elle dépassait difficilement les 5 %. Forte de ce succès, la chaîne a largement misé sur la Reality TV en proposant des émissions comme Expedition Robinson (seuls sur une île déserte), Mega Man (sept épreuves marathon pour les costauds) ou Le Bus ("On the road again" ou la vie dans un bus). Des activités qui lui auraient rapporté près de 500 millions de francs de recettes publicitaires en 2000.
Or, le téléspectateur allemand commence à se lasser de ces émissions au parfum de scandale, mais sans scandale, à cette intimité factice et ennuyeuse ou encore aux aventures de pacotilles. Alors que Big Brother 2 avait attiré jusqu’à 5 millions de téléspectateurs, Big Brother 3, vient de s’achever avec moins d’un million de téléspectateurs pour les dernières émissions. IP Deutschland, la régie publicitaire de RTL 2, s’est même vue dans l’obligation de diviser par deux le prix de l’espace publicitaire. Une déroute que connaît également la chaîne concurrente SAT 1 (groupe Kirch), avec Girlscamp (dix filles superbes se battent pour un garçon). Conséquence, la quatrième série de Big Brother a été repoussée à l’an prochain, peut-être. En attendant mieux, le container de Big Brother et ses 28 caméras devrait être loués à prix d’or aux entreprises friandes de jeux de rôles pour cadres démotivés ou à de jeunes mariés à court d’idées.