Les députés britanniques discutent d’un projet de loi fort controversé : la RIP Bill. L’internaute y est présumé coupable et, de toutes façons, il sera surveillé par les services secrets de Sa Majesté.
Au récent sommet parisien du G8, les représentants anglais avaient joué les snobs. Non merci, ils n’avaient besoin de personne pour lutter contre la cyber-criminalité. On comprend mieux leur attitude à la lecture du projet de loi discuté, en ce moment, par les députés britanniques. Sous couvert d’étendre le cadre légal des écoutes téléphoniques à Internet, la RIP Bill (pour Regulation of Investigatory Powers) étend considérablement les pouvoirs de surveillance du réseau des réseaux.
Le texte prévoit l’installation par les fournisseurs d’accès Internet (FAI) de systèmes de surveillance enregistrant l’intégralité du trafic (mail, Web, IRC, chat, etc.) passant par leurs serveurs. Le tout directement connecté au quartier général du MI5 (l’équivalent britannique de la Direction de la surveillance du territoire). Pour traiter cette masse de données, les services secrets de Sa Majesté ont d’ailleurs prévu la création d’un Centre gouvernemental d’assistance technique doté d’un budget de 275 millions de francs.
Obligation de décrypter
Le volet relatif à la cryptographie autorise les forces de l’ordre à demander aux internautes anglais de décrypter les messages qu’ils auraient chiffrés. En cas de refus, d’oubli ou de perte du mot de passe, les "fautifs" encourraient une peine de deux ans d’emprisonnement. Ce qui revient de facto à être présumé coupable et à la contrainteprouver son innocence... Il est également strictement interdit, sous peine de cinq ans de prison, de révéler à qui que ce soit que la police a tenté de casser le cryptage en question. Une société serait ainsi incapable de prévenir un partenaire commercial que le système n’est plus sécurisé puisqu’une des portes d’entrée a été déverrouillée... C’est toute l’infrastructure sécurisée du commerce électronique qui se retrouve en danger.
Loi plus dure qu’en Russie
En Grande-Bretagne, le projet de loi a déclenché un véritable tollé, malgré les 229 amendements déposés à la Chambre des communes. Pour beaucoup, le texte est plus dur que ceux actuellement en vigueur en Russie, où le FSB (successeur du KGB) a installé une ligne directe entre ses bureaux et les fournisseurs d’accès. La majorité des journaux, dont le très sérieux Financial Times, ont pris position contre ce projet de loi. Tout comme la chambre de commerce anglaise ! Dans un rapport, elle estime le coût de la RIP Bill - investissements technologiques, fuite des capitaux et manque à gagner - à 46 milliards. Outre les atteintes graves à la vie privée, c’est tout le secteur économique lié aux nouvelles technologies qui s’en trouverait fragilisé.
Regulation of Investigatory Powers Bill
http://www.homeoffice.gov.uk/oicd/r...
Information Centre of the Foundation for Information Policy Research
http://www.fipr.org/rip