On leur a dit : pliez bagage, la suite se fera à Marseille. Les trente salariées d’Avenir Telecom ont fait leur vie à Ivry-sur-Seine, en banlieue parisienne, elles y resteront.
Ghislaine CatonaudKarine Portrait |
Elles s’alignent sous la banderole et se serrent un peu pour la photo. Elles sourient, elles se tiennent droites. Et l’une dit : "
Allez, ayez l’air plus combatives." Elles sont une petite vingtaine devant ce grand immeuble vieillot à l’entrée d’Ivry-sur-Seine (94). Des tracts oranges dans la main pour dénoncer la délocalisation de leur service, trente personnes, à Marseille. Tout a commencé mi-février. "
Nous avons reçu une lettre qui avait pour objet ceci : transfert des activités pour motifs économiques des sites d’Ivry-sur-seine et de Lyon vers Marseille", explique Ghislaine Catonaud, la déléguée CFDT. Les trente personnes ont le choix : rejoindre Marseille ou être licenciées si le reclassement n’est pas possible. Avenir Telecom est une grosse boîte du secteur des télécommunications dont le siège est à Marseille, mais dont plusieurs services et filiales sont installés en banlieue parisienne et en province. Le site d’Ivry s’occupe de la gestion des abonnements de téléphonie mobile pour les opérateurs.
Aucun respect
 Karine Portrait |
Début mars, le personnel reçoit un mail d’information. Le mail de trop. L’une des manifestantes s’énerve : "
C’était un mail du président qui nous disait qu’il était très fier des résultats, qu’on était les meilleurs mais qu’il ne fallait pas perdre de vue le prochain challenge : réaliser un milliard d’Euros de chiffre d’affaires en juin 2001." Elles - car ce ne sont pratiquement que des femmes - ont l’impression d’avoir été trahies. Elles ont déjà suivi le mouvement quand les locaux de leur service ont été transférés de Santeny à Ivry. Toutes disent qu’on leur promettait un bel avenir. Et qu’elles y ont cru."
Nous avons beaucoup travaillé, nous nous sommes investis et voilà comment on est remercié", dit l’une d’elles, aux grands yeux clairs. Pas question d’aller à Marseille. Pas question d’abandonner la maison parfois achetée, le mari, les amis, la vie. Elles ont entre 30 et 40 ans et cette fois on leur demande trop. "
En février, ils ont même fait visiter nos locaux aux commerciaux qui vont venir s’y installer. De toutes façons, ils n’ont aucun respect pour nous, ils ne nous écoutent même pas." Leurs revendications sont sages, elles n’espèrent même pas faire revenir la direction sur sa décision mais au moins obtenir de meilleures conditions de licenciement. "
Nous demandons un plan social : un an de salaire et 46 000 francs de formation par salarié. C’est la moindre des choses." Jeudi 15 mars, ce sera leur dernier jour de travail. Ensuite, les bureaux leur seront fermés "
pour travaux". N’empêche, jusqu’au 16 avril, date effective de leur période de préavis, elles viendront chaque matin, avec leurs banderoles. Pour se faire entendre.