Compaq cède sa division semi-conducteurs à Intel, qui équipera tous les gros serveurs Compaq de son Itanium. Un pas vers plus de services et moins de hardware.
Une poignée de main chez les poids lourds. Lundi 25 juin, Michael Capellas, le PDG de Compaq, et Craig Barret, son homologue chez Intel, ont en effet annoncé un accord de grande envergure liant les deux sociétés dans le domaine des gros serveurs. D’ici 2004, Compaq va transférer son activité superconducteurs, la division "Alpha", vers Intel, qui se porte acquéreur des licences et embauche plusieurs centaines d’ingénieurs Compaq. Si une dernière génération de puces Alpha sera développée par Compaq, son offre d’ordinateurs à processeurs 64 bit sera, à terme, équipée des nouveaux Intel Itanium, une série haut de gamme "révolutionnaire" lancée en juin 2001.
Bonne affaire pour Intel
Pour les analystes du marché, c’est Intel qui réalise la meilleure affaire : la société élimine ainsi une puce rivale et se renforce dans le secteur des gros serveurs. La décision de Compaq a reçu un accueil plus mitigé, notamment parce qu’elle constitue un revirement de stratégie. En 1998, Compaq avait acquis Digital Equipment, le fabricant d’origine des puces Alpha. Ce rachat historique, le plus important du secteur à l’époque, se révèle en fin de compte peu productif... Si le leader mondial du hardware fait aujourd’hui ce mouvement délicat, c’est qu’il s’est lancé dans une imposante restructuration : migrer du marché hardware, ultra concurrentiel et en proie à une sanglante guerre des prix, vers la fourniture de solutions packagées pour les entreprises, intégrant des services et du software.
Plan quinquennal
Révélé par le Wall Street Journal qui s’est procuré un mémo diffusé en interne la semaine dernière, le changement stratégique de Compaq a un objectif clair : faire passer la part des services dans le chiffre d’affaires de 20 à 33 % d’ici 2004. Pour obtenir une telle croissance, Compaq a prévu de dépenser 500 millions de dollars pour racheter des sociétés dans le secteur des services et du software. En interne, Michael Capellas évoque aussi de grandes manœuvres, dont la création d’une importante cellule marketing chargée de penser des solutions sur-mesure pour les clients. La cible désignée de cette machine de guerre sont les grandes entreprises de la finance, des télécommunications et de la santé, et non plus " ’internaute", à l’évidence moins "profitable" que les géants du business. En réorientant son image de marque, Compaq tourne donc le dos au grand public. Défensif, le plan d’attaque de Compaq s’inspire du positionnement d’IBM, qui se veut depuis longtemps "fournisseur de solutions pour une petite planète". Coïncidence amusante, Big Blue a d’ailleurs annoncé mardi 26 juin une avancée significative dans la course de vitesse que se livrent les fabricants de microprocesseurs : à 210 GHz, les nouveaux transistors IBM sont plus rapides que toutes les technologies actuelles.
Pendant ce temps, l’action Compaq flirte aujourd’hui avec son niveau le plus bas depuis un an (13,20 dollars contre 13,54 dollars) et risque de ne pas remonter grâce aux annonces récentes. En effet, la stratégie d’avenir de Compaq passe aussi, toujours selon le mémo interne, par 200 millions de dollars de réductions de coûts, qui s’ajoutent aux 600 annoncés en début d’année.