Comment limiter, voire réparer, la fracture numérique ? La question n’est pas facile, et l’institut Aspen l’a posée, la semaine dernière, à Lyon, à un panel international de chercheurs, fonctionnaires, hommes d’affaires et enseignants.
La réponse n’est pas facile, et deux jours de discussions n’ont pas amené de solution miracle. Les exemples de Parthenay, toujours et encore (avec Michel Hervé, le maire, en convaincant missionnaire de l’administration numérique), mais aussi de GrameenPhone, au Bangladesh, ont permis au moins de mettre en évidence l’importance du leadership, de l’exemplarité et de l’accès facilité.
Parthenay, on connaît : une petite ville de 11 000 habitants qui devient fournisseur d’accès, donne une connexion à tous les habitants, et crée un Intranet, réservé aux citoyens de la ville, avec accès total aux documents et fonctionnaires municipaux. Résultat : explosion de l’action associative, explosion des connexions ADSL, développement global du Réseau, et satisfaction quasi générale.
GrameenPhone, c’est encore autre chose : la création au Bangladesh d’un réseau de téléphonie sans fil. Sollicité pour le financement, la plupart des grandes banques internationales ont répondu qu’elles n’étaient pas la Croix-Rouge. Quatre ans après le projet, celui-ci fonctionne, a trouvé 250 000 abonnés dans un des pays les plus pauvres du monde et continue à se développer. Les utilisateurs, souvent totalement analphabètes, ne mettent pas plus d’une journée à comprendre l’utilisation de cet engin très sophistiqué. Et font du business, améliorant leur niveau de vie : le propriétaire du téléphone loue son appareil à ses voisins villageois. GrameenPhone est en passe d’avoir plus d’abonnés que le réseau téléphonique filaire tenu par un monopole d’...tat (qui a d’ailleurs refusé l’interconnexion avec son réseau...).
Leadership : d’un côté, le maire de Parthenay, de l’autre un entrepreneur bangladeshi, aidé par Muhammad Yunus, le charismatique fondateur de la Grameen Bank, la banque des pauvres du Bangladesh (la seule qui prête à taux non-usurier, et sans demander de garantie personnelle).
Exemplarité : la mairie de Parthenay s’y est mise tout de suite. La Grameen Bank a été la première à équiper son réseau des téléphones portables de la Grameen Phone.
Accès facile : Parthenay regorge de points multimédia avec accès libre. Et a offert la connexion internet gratuite à ses citoyens, dès 1996. GrameenPhone permet à des gens n’ayant rien, et surtout pas de quoi acheter un téléphone, de s’équiper par un système souple de location. Et ceux-ci arrivent, en travaillant grâce au téléphone, à gagner plus que le prix de la location.
Tout cela pour dire quoi ? Qu’il nous manque pas mal de cela en France.
Leadership ? De qui ? Qui est le Al Gore français ?
Exemplarité ? De qui ? L’administration française est très en retard, et une ville comme Paris n’a même pas d’Intranet... Chez nous, c’est faîtes ce que je dis, mais pas ce que je fais.
Accès facile ? Certes, il y a les cybercafés. Mais presque pas de salles internet, avec plusieurs ordinateurs connectés en libre accès, dans les écoles, les mairies, les lieux publics. Ce serait le moyen de permettre à tous, même ceux qui ne peuvent s’offrir une machine, d’utiliser les ressources du Réseau.
L’institut Aspen avait bien raison d’organiser cette conférence en France : on a beaucoup à apprendre...