Aux Etats-Unis, nombre d’entreprises ont désormais recours à des logiciels permettant d’intercepter non plus les e-mails mais aussi les messages instantanés de leurs employés.
Imaginez la réaction des employés de la compagnie américaine de logiciels Sonalysts, lorsque l’un des responsables leur a annoncé que leurs chats pouvaient être surveillé. SILENCE DANS LA SALLE ! Telle fut la réponse des salariés stupéfaits. Cela se passait, il y a un an, lors de la réunion annuelle de l’entreprise. Randy Dickson, analyste-système, avait fait la preuve que les chats n’échappaient pas à la direction en exhibant les extraits de messages privés échangés par deux employés de la firme. Cette histoire, rapportée par le New York Times, ouvre un peu plus le débat, récurrent, sur la cyber-surveillance dans les entreprises.
Inquiétudes des entreprises
Les firmes américaines, comme françaises, utilisent des logiciels de filtrage afin d’empêcher le ralentissement de leurs serveurs par des messages autres que professionnels. La méthode est aujourd’hui acceptée dans les entreprises à condition que les salariés en soient informés au préalable et que la surveillance n’outrepasse pas le droit au respect de la vie privée de l’employé (en tout cas en France).
Mais voilà, aux Etats-Unis, après la chasse aux e-mails les entreprises traquent les chats gênants. L’objectif : éviter que l’échange d’informations confidentielles ne vienne perturber les activités de l’entreprise. Ilustration par l’histoire de ce responsable financier d’un fond d’investissement de la côte Ouest, qui avait envoyé par chat un message à plusieurs amis de la profession, faisant état d’une rumeur courant à propos de l’entreprise People Soft. Celle-ci était suspectée de faire l’objet d’une enquête par la US Securities and Exchange Commission (SEC, l’équivalent américain de la Commission française des opérations de bourse (COB)). Personne ne saura jamais si ces messages sont directement à l’origine de la baisse subite des actions de l’entreprise. Mais bien qu’il fut impossible de démontrer la connexion entre les deux, la firme s’est quand même empressée de publier un démenti et le responsable en cause ne fait aujourd’hui plus partie de la société.
Les traces des chats
Si les e-mails sont facilement consultables par les services informatiques, les chats, eux, sont censés ne laisser aucune trace...Ou presque. Téléchargeables gratuitement par les internautes, les logiciels de discussion, comme ceux édités par America Online, inquiètent les entreprises. Si certaines firmes acceptent bon gré mal gré l’utilisation des chats, d’autres sont moins coulantes. Soit l’utilisation des logiciels de chat est bannie, soit les entreprises étatsuniennes recourrent aujourd’hui à l’installation de programmes d’interception qui permettent d’enregistrer les conversations instantanées. Certaines ont investi dans des systèmes tels que Lotus SameTime mis au point par IBM, ou encore Communicator Hub IM de la société Communicator Inc. Résultat : le marché se développe pour le bonheur des industriels du logiciel. La compagnie FaceTime vient d’ouvrir des locaux à New York pour répondre à la demande des entreprises de Wall Street et le géant Microsoft a annoncé en février qu’il mettait au point l’intégration d’une solution d’archivage (de la société IM Logic) dans la prochaine génération de ses logiciels de chat (Windows messaging software). Instantanés ou non, les web-conversations n’échapperont donc plus à la vigilance des employeurs. Une évolution à laquelle la France ne fera sans doute pas exception.