Depuis que Vivendi lui a versé 8 millions de francs pour pouvoir utiliser le nom vizzavi, Ababacar Diop multiplie les projets. Mercredi 23 août, l’ancien porte-parole des sans-papiers célébrait le quatrième anniversaire de l’expulsion de l’église de Saint-Bernard. Portrait et interview vidéo.
Il y a le bruit assourdissant des djembés et les cris des manifestants. Il y a les robes vertes des femmes noires et les drapeaux accrochés rapidement tout autour de l’église Saint-Bernard. Il y a aussi Ababacar Diop. La star. Quatre ans plus tôt, ce Sénégalais était expulsé de l’église avec des dizaines d’autres sans-papiers par les CRS. Ce mercredi 23 août 2000, carte de séjour en poche, l’ancien porte-parole se balade entre les manifestants, en personnage public qui veut rester simple. Son portable sonne sans arrêt, les journalistes se l’arrachent, les sans-papiers viennent lui demander s’il est juriste, s’il peut les aider, s’il a un conseil à donner... Ababacar retrouve des compagnons de lutte, serre les mains, caresse la tête d’un gosse...
Attendu au tournant
Veste en jean et chapeau pointu accroché dans le dos, il a délaissé pour l’occasion le costume de l’homme d’affaires. Á 31 ans, l’homme est en effet millionnaire depuis quelques mois. Depuis l’erreur de Vivendi qui a lancé un portail wap, vizzavi.fr, sans vérifier si quelqu’un avait déjà déposé le nom. Jackpot de huit millions de francs pour Ababacar, fondateur quelques mois plutôt d’un cybercafé baptisé Lire Une bourde de Vivendi fait la fortune d’Ababacar Diop). Lucide, ce militant du Parti communiste sait qu’on l’attend au tournant, qu’il ne pourrait pas, même s’il en avait l’envie, dépenser ces millions comme bon lui semble. Le discours est bien rodé : " Cet argent n’a pas changé mes convictions. Je ne l’ai pas placé dans une banque pour le faire fructifier. Je veux le mettre au service des autres. " Ses premiers investissements : l’achat de logements à Paris destinés à des locataires à bas revenus et le lancement d’un projet de restaurant, cyber et associatif.
Un cybercafé à Dakar
4ème anniversaire de l'expulsion de l'église de Saint-BernardKarine Portrait |
Cela dit, le jeune père (deux petites filles) n’avait pas attendu la manne Vivendi pour avoir des idées. Depuis sa régularisation en août 1997, délaissant la lutte, il a axé son action sur l’intégration : une association pour financer des micro-projets en Afrique, un espace de solidarité à Paris offrant accès Internet, secrétariat et conseils aux chômeurs immigrés. Cet été, Ababacar est retourné au Sénégal, prendre un peu le soleil et monter un cybercafé à Saint-Louis. " Il faut qu’Internet se développe en Afrique. Nous n’avons pas le droit de nous laisser distancer là-dessus. " Á Dakar, l’ancien de Saint-Bernard s’est aussi acheté une maison. Pour réaliser un vieux rêve : s’installer au Sénégal après douze années parisiennes, loin du métro et tout près de la mer.
Le site du cybercafé vis@vis:
http://www.visavis.tm.fr