Le fournisseur d’accès est excédé par les demandes de la justice américaine qui lui enjoint de plus en plus de révéler les noms des anonymes qu’elle recherche. L’ACLU et l’EFF sont d’accord avec lui.
Le fournisseur d’accès américain AOL en a marre. Marre et re-marre que la Justice lui impose de communiquer l’identité d’internautes utilisant ses services, chaque fois qu’un propos diffamatoire, insultant, propre à déchaîner les foudres de la loi, s’inscrit sur un site. Et il n’y a pas que lui. Une union sacrée, inhabituelle sur le sujet, vient d’avoir lieu cette semaine aux ...tats-Unis, rassemblant autour du fournisseur deux acteurs majeurs de la liberté d’expression : l’American Civil Liberties Union (ACLU), une association de défense des droits de l’homme, et l’Electronic Frontier Foundation (EFF), un organisme de veille sur l’exercice des libertés sur le Réseau.
Un procès intenté par une juge
La colère argumentée d’AOL est exposée dans un document de procédure communiqué à la cour d’appel de Pittsburgh (Pennsylvanie), lundi 5 mars. Cadre : un procès en diffamation intenté par une juge, offusquée qu’un internaute sous pseudo ait laissé entendre qu’elle usait de son influence pour peser sur des désignations politiques. Au mois de novembre 2000, dans un premier jugement à l’échelon d’une cour locale, un juge avait tranché en défaveur de la plaignante : "Les internautes anonymes, à la différence des médias nationaux, sont vulnérables car ils manquent de pouvoir ou d’argent. Sans l’anonymat, ils seraient moins enclins à exprimer des opinions controversées par peur de représailles", expliquait-il. L’affaire avait alors été saluée par L’ACLU, partie au procès, comme l’affirmation des "premières protections jamais établies vis-à-vis des critiques online de personnalités publiques".
Le premier amendement au secours de l’anonymat
C’est naturellement moins la protection des internautes qui, aujourd’hui, mobilise AOL, que le poids des procédures multiples générées au sujet des internautes anonymes. "Le fardeau procédural s’est accru. L’année dernière par exemple, AOL a fait l’objet de 475 citations, 40 % de plus qu’en 1999", explique l’entreprise. Et tout ce qui va avec : mobilisation d’avocats de la firme, frais, temps. L’argumentation juridique du fournisseur d’accès pour se soustraire aux demandes répétées des juridictions américaines est cependant tout autre : cette tracasserie juridique est contraire à la liberté d’expression, garantie par le premier amendement de la constitution des ...tats-Unis, plaident ses avocats. C’est la première fois qu’une cour aura à examiner un tel raisonnement juridique.