Philippe Germond, PDG de Cegetel, redit la volonté de l’opérateur de faire baisser le prix de la licence UMTS qu’il a obtenue.
Vivendi a finalement accepté d’acquitter la première tranche de la facture pour sa licence UMTS : Bercy a annoncé, le 2 octobre au matin, avoir reçu les 619 millions d’euros que l’opérateur avait bloqués la veille sur un compte de la Caisse des dépôts et consignations. Et cela, "sans conditions". Vivendi n’aurait obtenu de l’...tat aucun engagement de modification du prix ou du calendrier des paiements.
Ceci dit, le problème n’est pas réglé. La facture totale pour chacun des deux opérateurs ayant reçu une licence UMTS s’élève à 4,95 milliards d’euros. La deuxième tranche devra être versée le 31 décembre. Vivendi exige un accord sur le réaménagement ou la baisse du prix avant cette date. France Télécom a également demandé une révision des conditions d’attribution, lors d’une interview donnée aux Echos par Didier Quillot, responsable de la filiale de téléphonie mobile Orange. Ce dernier compare les prix français à ceux des licences danoises, et estime qu’il faudrait payer 1,3 milliard d’euros par opérateur dans l’Hexagone.
Philippe Germond, PDG de Cegetel, est encore plus gourmand : il a laissé entendre qu’un milliard d’euros serait encore mieux... Somme qui serait dépassée dès le versement de la deuxième tranche.
Interview de Philippe Germond, PDG de Cegetel
Qu’avez-vous obtenu de Bercy en échange du paiement des 619 millions de francs ?
Nous n’avons pas obtenu d’assurances quant au prix et aux modalités de paiement des licences. Mais nous avons l’engagement de toutes les parties – le gouvernement, les deux opérateurs, l’Autorité de régulation des télécommunications [ART] – de rentrer vite dans de vraies discussions pour clarifier la vraie valeur des licences UMTS.
Quand vous avez accepté la licence, vous connaissiez déjà le prix. Pourquoi demander maintenant une baisse ?
Nous n’avons pas signé de contrat pour les licences UMTS. La dernière signature date du dossier de candidature que nous avons remis à l’ART. Ensuite, Christian Pierret a apposé sa signature le 18 juillet sur l’attribution de licences, mais pas nous. Nous ne sommes donc pas dans le droit des contrats, mais dans le droit des autorisations administratives. En droit public, il existe un principe de proportionnalité : le prix d’usage d’un bien public doit être proportionnel à la valeur que nous allons en retirer. Les circonstances ont changé, il nous semble normal de réviser le prix de la licence. Un, les marchés financiers ne sont plus ce qu’ils étaient l’année dernière. Deux, on sait maintenant que l’UMTS devrait avoir un retard de deux ans. Trois, 54 municipalités – représentant quelques dizaines de pour cent de la population française – ont pris des arrêtés interdisant l’installation de nouveaux équipements radio à moins de cent mètres des habitations.
Que souhaitez-vous ?
Lors de sa communication, le 31 mai, Jean-Michel Hubert a préconisé la révision de la structure tarifaire des licences. Il a évoqué la possibilité de payer le premier quart de la facture en 2001, puis de suspendre cinq années durant les paiements, pour les reprendre ultérieurement avec des modalités à revoir. Les paiements pourraient alors être annuels, et progressifs, indexés sur l’augmentation des revenus de l’UMTS. Il y a aussi la possibilité d’allonger la durée de la licence à vingt ans, mais ça je n’y pense pas pour l’instant. Notez que le principe de proportionnalité s’applique dans les deux sens : si l’UMTS avait un succès phénoménal, on pourrait revoir les conditions à la hausse. Il y a déjà une jurisprudence semblable sur les concessions d’autoroutes.
Vous étiez déjà en négociations avec le gouvernement sur la révision des licences. Pourquoi avoir bloqué le premier versement ?
Nous avons effectivement pris contact avec le gouvernement pour aménager la structure et le prix des licences. Mais la négociation s’est réduite à deux points : aménager les paiements pour l’année 2002 – comme si ce n’était qu’un problème de trésorerie, et partager les réseaux avec d’autres opérateurs. Cela n’apporterait rien à notre business plan. Le vrai problème, c’est le prix de la licence. C’est pourquoi nous avons été satisfaits du message du gouvernement hier. Il s’est déclaré prêt à sensiblement élargir les discussions. Mais il faut que ce soit très rapide. Le prochain paiement a lieu le 31 décembre, et il n’est pas sûr que nous le versions.
Vous ne souhaitez pas attendre l’attribution d’une deuxième vague de licences UMTS pour réviser les conditions ?
Non. Si ce deuxième tour est effectué en 2003, France Télécom et nous aurions déjà payé 2,5 milliards d’euros chacun. Comme il existe un principe d’égalité ou d’équité, il y aura un ajustement rétroactif pour les autres ; n’en déplaise à Martin Bouygues qui voudrait payer moins cher que les autres au mépris des règles du droit public. Soit on nous rendra l’argent, ce qui est compliqué en pratique ; soit on mettra le prix des licences à 2,5 milliards d’euros. Et à ce prix-là, je pense qu’il n’y aura plus de troisième ou quatrième candidat. Si on place la licence à 1 milliard ou 1,2 milliards d’euros, il y aura au moins un candidat. Ensuite, au cas où les affaires seraient excellentes, on pourra décider des aménagements conformes à la clause de meilleure fortune.
Vous évoquez les retards de l’UMTS. Quand lancerez-vous votre service commercial ?
Les premiers tests techniques devraient avoir lieu fin 2002. Mais le délai avant le lancement commercial ne sera pas de quelques petits mois : il faudra au moins neuf mois si ce n’est plus pour assurer la compatibilité entre les systèmes GPRS et UMTS. Nous prévoyons donc un lancement commercial fin 2003. Et encore, ce ne sera pas un lancement en volume. Il n’y aura pas de quantités significatives de terminaux sur le marché avant 2004. En décembre dernier, nous avions des engagements de livraison de portables que les industriels ne tiennent plus aujourd’hui.