Des caméras dans la rue, les magasins, le bureau. Des écoutes téléphoniques toujours possibles (et parfois probables). Des portables qui permettent de nous repérer géographiquement.
Des caméras dans la rue, les magasins, le bureau. Des écoutes téléphoniques toujours possibles (et parfois probables). Des portables qui permettent de nous repérer géographiquement. Et Internet, où il est si facile d’explorer nos e-mails et de surveiller nos balades. Il y a de quoi être paranoïaque. La société vire orwellienne et la France mateuse approuve en plébiscitant des post-ados dans un loft de carton-pâte, bourré de caméras.
En fait, il n’y a qu’un seul élément vraiment gênant dans ces grandes manœuvres mi-sécuritaires, mi-voyeuristes : nous n’avons pas accès à toutes les caméras, à tous les enregistrements. D’où l’inquiétude : nous ne savons pas qui nous observe, et dans quel but. Pire : quand la loi nous donne la possibilité de le savoir, par exemple en demandant aux mairies et préfectures l’emplacement et l’utilisation des caméras, certains des « surveillants » expliquent tranquillement aux journalistes de Transfert qu’ils n’en ont rien à faire... Circulez, vous ne verrez rien : la démocratie a ses limites et la loi n’engage que ceux qui y croient.
Parano à juste titre ? L’opacité rend méfiant. Alors ouvrons tout : demandons l’accès libre, permanent, à toutes les sources de surveillance. Exigeons des caméras dans les bureaux des surveillants, avec libre diffusion des images sur le Web ou tout autre moyen (câble ?).
Après tout, il n’y a aucune raison que le maire d’une ville puisse faire surveiller les citoyens sans que ceux-ci
puissent voir, en permanence, ce qui se passe dans la mairie. Bureau par bureau. Imaginons : une webcam dans le bureau du préfet de police de Paris... Une autre dans celui du maire de Lyon... Et dans celui des vigiles du grand magasin. Et dans celui du directeur. Le tout, bien sûr, visible par tous : la société technologique ne vaut que si elle est partagée par tout le monde.
Transformons donc notre pays en un gigantesque Loft Story, où chacun pourra surveiller les autres. Sans exclusive. Paradoxalement, on y gagnera, à terme, une véritable vie privée. Car trop d’infos tue l’info. Si tout est disponible, en permanence, plus personne ne verra d’intérêt à mater, pour les 543e fois, les seins de Loana sous la douche. Ni la circulation sur le boulevard Diderot ou le maire se mettant les doigts dans le nez. Tout le monde n’aura qu’un souhait : débrancher, arrêter de surveiller, retourner à la « vraie vie ». Sauf les experts de la surveillance, bien sûr. Eux garderont les yeux fixés sur leurs écrans de contrôle, comme aujourd’hui. Mais ils ne pourront s’empêcher de penser qu’ils ont, eux aussi, une petite caméra au-dessus de leurs têtes. Et qu’il y a, peut-être, de l’autre côté, un citoyen qui les observe. On n’aura peut-être pas atteint la liberté mais, au moins, l’égalité paranoïaque. Ce sera déjà cela de pris. Tous aux webcams !