Acte 1 : Préparez le terrain
Prenez un nouveau mode de communication, de préférence mondial et décentralisé. Internet, au hasard. ...vitez de parler de l’immense majorité des utilisateurs, qui en font un outil d’échange, d’entraide et de solidarité. Insistez sur les rares terroristes et pédophilo-nazis du Réseau. Baptisez ceci d’un nom facile à retenir, comme « dérives de l’Internet », et vous verrez que, très rapidement, personne ne pourra plus parler du Réseau sans évoquer ses dérives...
Acte 2 : Attaquez-vous à la prescription
Prenez ensuite pour cible un principe démocratique gênant, au hasard la prescription abrégée de trois mois en matière de presse. Expliquez qu’il est scandaleux que les terroristes et les pédophilo-nazis (voir ci-dessus)... Essayez d’obtenir une jurisprudence, ou mieux, une loi, qui exclut l’Internet des médias bénéficiant de cette prescription... Vous avez désormais tout le temps de poursuivre vos opposants puisque vous avez le choix dans la date de commission de l’infraction.
Acte 3 : Le Manuel de savoir nuire
Une fois établi le principe selon lequel la prescription de trois mois ne s’applique pas à l’Internet, obtenez la condamnation d’un journaliste dont un vieil article dérangeant a été repris sur le site web de son journal, et, comme dirait Argan, le malade imaginaire, « voilà pourquoi votre presse est muette ». Bien sûr, personne, dans notre beau pays, ne songerait un seul instant à abandonner les principes démocratiques dans le but de réprimer les dérives de l’Internet. Bien sûr. Ni à utiliser ce Manuel de savoir nuire à l’usage des dictateurs et des malfaisants...
*Sébastien Canevet est professeur de droit
à l’université de Poitiers et médiateur en ligne.