Nicolas Riou fut l’un de ces netentrepreneurs de la nouvelle économie euphorique. La suite fut moins rose : il la raconte dans Comment j’ai foiré ma start-up.
Il y a une chose qu’on ne peut retirer à Nicolas Riou : il a un formidable sens du titre. Comment j’ai foiré ma start-up résume à lui seul les quelques mois de cette rage d’entreprendre qui saisit la France et propulsa à leur empyrée des centaines de start-ups dont beaucoup périrent de manière tout aussi fulgurante. Riou, 34 ans, venu de la pub, a testé en direct l’ascension et la dégringolade : au printemps 2000, il lance Unhomme.com, un site « éditorial » masculin. À l’automne, l’aventure est terminée, la start-up mise en liquidation. Entre ces deux saisons, des espoirs, de la sueur, des gaffes, des désillusions. Et toujours l’urgence. Pourquoi ne pas mettre ça dans un livre ?, s’est demandé Riou, avec un sens de l’à propos assez génial. « ...crire un livre m’a permis de sortir un peu de tout ça, de prendre du recul », explique l’auteur, qui, aujourd’hui, ne s’est « volontairement » pas recasé dans une autre entreprise.
Tous les ingrédients sont là pour un roman extraordinaire : les grands fantasmes de winners, prêts à bouffer le monde entier, l’entrée en Bourse certaine, l’expansion européenne assurée, les us et coutumes des porteurs de Palm et leur jargon babélien, les puissants investisseurs perchés sur leurs montagnes de billets... La tragédie aussi est présente à chaque page : les business plans dérisoires, les leveurs de fonds foireux, les 300 francs de chiffre d’affaires ( !) et l’échec, inévitable.
Mais là où on attend une plongée balzacienne dans les coulisses des start-ups, Riou se fend d’un récit lapidaire, sans dialogues. « Ce n’est pas un roman », reconnaît-il. Il admet avoir produit son opus en seulement trois semaines. Et soudain, les « points de compétitivité différenciants » et autres « synergies » qui truffent son bouquin, nous flanquent la trouille. N’a-t-il donc rien appris ? Et si c’était à refaire, que ferait-il ? « Je me lancerais plus tôt, j’engagerais une équipe moins nombreuse et je serais plus économe », répond-il simplement. C’est, semble-t-il, la morale de son histoire.
Comment j’ai foiré ma start-up, éditions d’Organisation, 97 p., 50 F