Atteint d’un cancer très rare, il a été trompé par son chirurgien. Pendant l’opération, celui-ci
a conservé un échantillon de ses cellules malades, avant de les faire breveter.
« Certains d’entre vous me connaissent sûrement comme le brevet n°4 438 032. Mon vrai nom est John Moore. » C’est ainsi que se présente parfois ce père de famille de 57 ans. Son histoire, unique, est celle d’un patient dont les cellules ont été brevetées à son insu. En 1976, John Moore apprend qu’il a une forme très rare de cancer de la rate, qui lui laisse, au mieux, 5 ans à vivre. Il se rend à l’université de Californie consulter le docteur Golde, un grand spécialiste. Golde fait opérer Moore avec succès, mais prend soin de garder des échantillons de sa rate. Dans le cadre de son suivi post-opératoire, John Moore revient voir son sauveur, tous les six mois, pendant sept ans. En janvier 1983, Golde dépose une demande de brevet sur les cellules de John Moore. Elle lui est accordée l’année suivante. Quand Golde lui demande de signer un formulaire de consentement d’une trentaine de pages, Moore s’inquiète et découvre qu’il a été « trompé, volé et exploité par son docteur ». Il l’attaque en septembre 1984, ainsi que la société Genetics Institute et le groupe pharmaceutique suisse Sandoz, qui ont acheté les licences pour un nombre inconnu de millions de dollars.
Très médiatique, le procès qui s’ouvre en 1984 s’achève en 1990, devant la cour suprême de Californie. Elle rend un verdict historique : elle ne reconnaît à John Moore aucun droit de propriété sur ses cellules, « pour ne pas handicaper la recherche médicale en restreignant l’accès aux matériaux nécessaires ». L’industrie médicale se félicite, le docteur verse une compensation financière à John Moore, mais conserve son brevet. Depuis, John Moore s’est lancé, avec l’ONG Edmonds Institute, dans la lutte contre le biopiratage. Il clame son message de par le monde : « Que se passera-t-il quand les grands groupes pharmaceutiques revendront leur propre identité génétique aux gens dont le génome a été prélevé ? Qu’arrivera-t-il quand ils ne pourront
pas l’acheter car le prix sera trop élevé ? » Aujourd’hui, John Moore vit dans l’...tat de Washington et le docteur Golde poursuit sa belle carrière.