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1er/03/2001 • 11h08

Camps palestiniens,le Web comme refuge

archmag12
L’association Across Borders veut relier tous les camps de réfugiés palestiniens via le Web. Une véritable bouffée d’oxygène pour ces déracinés : le projet leur permet d’échapper à l’enfermement et de se former aux métiers du Net.

La salle informatique de Bourj Al-Shamali, au sud du Liban, ressemble à toutes les autres : ordinateurs, modems, imprimante et scanner y ronronnent paisiblement dans une odeur de peinture fraîche. En début d’après-midi, la salle s’anime soudain de rires d’enfants et d’adolescents. On vient surfer, jouer aux jeux vidéo ou, comme Mostafa, 14 ans, envoyer des mails. Mostafa communique presque tous les jours avec son ami Qussai, qui habite Dheisheh, en Cisjordanie. Ils se racontent leurs petites histoires, se posent des devinettes. Mostafa et Qussai ne se sont jamais rencontrés autrement que par écrans interposés et ne se rencontreront peut-être jamais. Car Bourj Al-Shamali et Dheisheh ne sont pas seulement des noms de communes, mais aussi ceux de camps de réfugiés palestiniens. Séparés par une frontière impossible à franchir et par 52 ans de silence. Depuis leur fuite de Palestine en 1948, les réfugiés de Bourj Al-Shamali n’avaient plus aucun moyen de communiquer avec leurs concitoyens dispersés dans toute la région. Au camp, les services postaux sont exsangues et les lignes téléphoniques tout bonnement interdites.

Modems et barbelés

Mais aujourd’hui, le camp est connecté, par câble, au Web - et au monde extérieur - par la volonté d’une association, Across Borders (« Au-delà des frontières »). « On comprend l’importance d’Internet quand on sait qu’un réfugié est quelqu’un qui vit en cage », martèle Muna Hamzeh, fondatrice d’Across Borders. L’organisme est né d’un de ces coups de gueule dont cette journaliste américano-palestinienne est coutumière (lire portrait p. 40) : un jour d’avril 1998 à Dheisheh, elle entend à la radio des enfants du camp raconter l’histoire de leur famille depuis 1948. « Je me suis dit : pauvres gosses. Personne dans le monde ne pourra entendre leurs textes, alors que, dans le même temps, on dépensait des millions pour célébrer le cinquantenaire de la création d’Israël. » Elle décide de monter, avec une amie américaine, un site pour publier les textes. Qui sera symboliquement inauguré le 15 mai, comme pour commémorer les 50 ans de ce que les Arabes appellent Al Nakba (« La Catastrophe », c’est-à-dire la guerre et l’exode des populations palestiniennes dès 1948). Le succès de l’initiative est immédiat et donne naissance, un an plus tard, à l’association, montée avec l’aide de l’université de Birzeit (Cisjordanie) et le soutien d’une ONG canadienne, Oxfam. Aujourd’hui, Across Borders nourrit de vastes ambitions : relier par le Net les 59 camps de réfugiés du Moyen-Orient, les faire se parler, s’entraider, bref, renouer par la Toile des liens que l’Histoire a défaits. Dheisheh a été le premier camp connecté. « Avec des ordinateurs datant de la Seconde Guerre mondiale », ironise Ziad Abbas, responsable du centre. Puis ce fut au tour des camps de Bourj Al-Shamali et de Khan Younis (Bande de Gaza). Intifada oblige, les travaux ont pris du retard, mais bientôt s’ajouteront ceux de Jalazone, Amari (voir carte p. 39) et d’autres. Aujourd’hui, la présence de caméras numériques et de modems neufs détone franchement dans le paysage des camps, où les barbelés n’ont pas toujours disparu et où des milliers de familles s’entassent dans un lacis insalubre de ruelles en ciment et de cahutes en parpaings, parfois en béton. Le décor reflète sans ambiguïté la misère et l’absence de libertés : des toits en tôle qui laissent passer la pluie, des chaussées défoncées jonchées d’ordures, des portes et fenêtres fabriquées de bric et de broc. Alors, quelle fierté pour les gens d’ici de raconter leurs entrevues régulières par mail et chat avec ceux de Cisjordanie, de Gaza ou même les grands frères ou cousins qui ont émigré en Occident. À Noël, le Net a fait un beau cadeau à une famille de Bourj Al-Shamali : un Palestinien vivant à Detroit a laissé un message dans la boîte électronique du camp. Il disait : « Je recherche ma mère. » On est allé prévenir une vieille femme. ...bahie, elle a conversé, par clavier interposé, avec celui qu’elle n’avait pas vu depuis des années. Sans parler de ce couple de San Francisco ou de cet artiste espagnol, qui ont, grâce au site, découvert l’existence du camp de Dheisheh et ont fait un crochet en Cisjordanie pendant leurs vacances, pour donner un coup de main ou dire simplement « bonjour ». Le secret d’Across Borders ? Y aller en douceur. Les centres qui accueillent leurs ordinateurs sont des lieux culturels déjà fréquentés par les Palestiniens. Des troupeaux de bénévoles étrangers n’ont pas débarqué pour tout installer et tout gérer. Seuls quelques occidentaux, principalement canadiens, sont là pour encadrer les projets. « Il est important pour nous que les coordinateurs, webmestres et techniciens soient recrutés à l’intérieur même du camp, et sur CV », explique David Leduc, coordinateur du projet au Liban. Le schéma est toujours le même : huit réfugiés reçoivent une formation et forment à leur tour tous ceux qui souhaitent apprendre. Les cours et le surf ne sont pas gratuits, pas « humanitaires », même si tout est largement abordable. À moyen terme, le pécule glané est suffisant pour que les centres rémunèrent leurs animateurs et, comme à Dheisheh, deviennent indépendants de la manne extérieure.

La conjuration de l’apartheid social

« Prends le temps de penser, c’est la source du pouvoir », professe une affichette punaisée dans le centre de Bourj Al-Shamali. Quasiment un programme pour Across Borders, qui enseigne l’informatique aux réfugiés, la population qu’on s’attendrait le moins à voir surfer sur le Net. Au Liban, 80 % des Palestiniens adultes sont ouvriers agricoles. La loi leur interdit d’exercer quelque 70 professions (médecin, avocat, chauffeur de taxi...). Du coup, la plupart abandonnent l’école à l’âge de 12 ans, découragés. On comprend combien l’informatique peut conjurer cet apartheid social. Et ce, même si, implicitement, la loi libanaise n’autorise pas les réfugiés à se lancer dans les métiers du Net. « Quand les compagnies libanaises auront besoin de webmestres et de techniciens, elles ne regarderont pas la nationalité », note placidement David Leduc. D’ailleurs, à Dheisheh, en Cisjordanie, où les réfugiés peuvent pratiquer tous les métiers, quelques-uns sont déjà connectés à la maison. Quelques-unes aussi. Car l’arrivée du Net fait doucement bouger les mentalités, surtout pour ce qui touche à la condition féminine. Across Borders met un point d’honneur à recruter un grand nombre de femmes pour l’encadrement des centres : « Elles étaient mariées et recluses dans leurs cuisines, on leur a donné une chance », se réjouit Ziad Abbas, à Dheisheh. Là encore, il a fallu y aller progressivement pour ne pas brusquer les esprits : à Jalazone, où un centre va bientôt ouvrir, filles et garçons n’apprendront pas l’informatique ensemble. La mixité effraie. C’était le cas aussi à Dheisheh et Bourj Al-Shamali. Plus maintenant. Seul le camp de Khan Younis, notoirement plus conservateur, résiste encore à l’évolution des mœurs. Aujourd’hui, chaque camp entretient son site, où chacun peut s’exprimer, exposer poèmes et sculptures. Une appropriation indispensable pour Muna Hamzeh. Un moyen aussi de délivrer une parole. « On entend pas mal d’organisations s’exprimer au nom des réfugiés, mais jamais les réfugiés eux-mêmes », souligne-t-elle, faisant allusion à Yasser Arafat et aux siens, qui dirigent l’Autorité palestinienne d’une main de fer et qu’elle égratigne sans fard dans son dernier livre (1). Mais laisser à un peuple en lutte la liberté de s’exprimer, n’est-ce pas tendre un micro aux discours extrémistes ? « Tous les journalistes me posent la question », sourit Muna, de passage en France pour la promotion de son livre. De fait, personne dans les camps n’ignore qu’ils sont nombreux, ceux qui voudraient faire des sites de camps un instrument politique. Muna Hamzeh s’y refuse : c’est elle qui relit, à distance, tout ce qui est publié sur le site de Dheisheh et affirme cependant ne jamais avoir eu à faire la police. « Il faut être prudent avec la censure, c’est dangereux. Quand quelqu’un écrit “ soldat sioniste ”, je lui demande par mail “ Pourquoi écris-tu ça ? Si un militaire t’a empêché de faire quelque chose ou t’a battu, écris-le simplement. Laisse le lecteur se forger lui-même son opinion ” , explique la journaliste formée à l’américaine. Parce qu’avec des termes comme “ sioniste, nazis ”, il va rebuter les lecteurs occidentaux. » Muna entend donner aux réfugiés palestiniens une leçon de vie occidentale, simple mais essentielle : « Porter un fusil ou lancer des pierres n’est qu’une partie du combat pour la liberté : il ne faut pas négliger la bataille de relations publiques, d’image et de communication. »

S’emparer des claviers

La leçon ne plaît pas à tout le monde. Une nuit d’août 2000, des inconnus ont mis le feu à l’un des deux centres, laissant 80 000 dollars de matériel informatique et un site en cendres. Les auteurs du sinistre ? La question provoque des silences gênés. Peut-être une association jalouse du succès d’Across Borders, un règlement de compte, un acte piloté par des Palestiniens proches de l’OLP ou, moins sûrement, au service d’Israël. Une chose est certaine : dans les camps, certains - une minorité - considèrent toujours confusément les étrangers d’Across Borders comme des espions israéliens. Mais les frayeurs s’estomperont à mesure que les réfugiés s’empareront plus encore des claviers et souris pour servir leur propre histoire. Muna Hamzeh nourrit d’ambitieux desseins à ce sujet : commencer à collecter et raconter sur Internet la petite histoire des camps, qui se transmet de génération en génération, celle des mille et une vicissitudes du quotidien, des espoirs, des peurs, si importante pour forger la mémoire collective d’un peuple. « Ce camps disparaîtront sûrement un jour, espère-t-elle. Il faut que les gens qui ont 40, 60 ans racontent à nos enfants ce qu’ils ont vécu. Pour se souvenir. »•

1) Jours ordinaires à Dheisheh, à commander sur
http://www.00h00.com http://www.acrossborderss.org
http://www.acrossborderss.org http://www.bourjalshamali.com, www.dheisheh.acrossborders.org
http://www.bourjalshamali.com, www.... http://www.khanyounis.acrossborders.org
http://www.khanyounis.acrossborders.org
 
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