A Mane, un village de 1300 habitants, un réseau Wi-Fi vient d’être démonté suite à une procédure visant à faire respecter les règles édictées par l’Autorité de Régulation des Télécoms. Des règles pour le moins infondées.
L’accès à Internet à haut débit, à des tarifs raisonnables, dans les zones rurales : certains y croient fermement. C’est le cas de Pierre Lefort. Cet habitant de Mane, un village de 1300 âmes situé dans les Alpes de Haute Provence, se bat pour offrir "un accès Internet à haut débit à des tarifs équivalents à ceux de l’ADSL ou du câble dans les villes".
Pour démontrer aux habitants, aux élus locaux et aux entreprises de sa région qu’une telle offre est possible, Pierre Lefort a présenté, le 19 avril dernier, un réseau sans fil basé sur la norme 802.11b, dite Wi-Fi, avec un accès à Internet. Au moyen d’une antenne Wi-Fi installé sur la citadelle de Mane et un relais basé chez SudWay, un prestataire Internet de la région partenaire du projet, il est parvenu à offrir (potentiellement) un accès Internet à 100 personnes avec un débit théorique de 11Mb/s sur un rayon de 4 à 5 km. Bilan de cette journée : "élus, journalistes, habitants : tous semblaient d’accord pour trouver cette démonstration très positive" selon Pierre Lefort.
Condamné à 229 euros
Tous semblaient convaincus, sauf l’ART (l’Autorité de Régulation des Télécoms). Interdits sur la voie publique, les réseaux Wi-fi empruntant la bande de fréquence de 2,4 GHz doivent en effet faire l’objet d’une demande d’autorisation auprès de cette instance. Une demande dont se passent bon nombre d’utilisateurs... Comme Pierre Lefort, qui n’a pas fait cette demande à l’ART, mais n’a jamais caché ses activités. Le 24 avril 2002, puis le 29 avril 2002, l’ANF (l’Agence Nationale des Fréquences, chargée de faire respecter les règles établies par l’ART) est venue enquêter à Mane. Suite à cette enquête, elle a engagé "une procédure à l’amiable", selon les termes de Monsieur Nicolaïe, le responsable du dossier de Mane à l’ANF, et réclamé 229 euros à Pierre Lefort "pour les frais engagés pour la recherche de brouillage". Une procédure accompagnée d’une demande de démontage des installations concernant le réseau.
Risque de brouillage "potentiel"
Le 3 mai 2002, à 14h30, Pierre Lefort, qui risquait une peine de 6 mois de prison et 30000 euros d’amende, a donc procédé au démontage de son antenne. Non sans rancœur. "J’aimerais savoir qui on brouille, si ce n’est le monopole de France Télécom", s’énerve-t-il. Du côté de l’ANF, les explications ne se révèlent pas vraiment convaincantes. "Nous n’affirmons pas qu’il y a brouillage, mais risque de brouillage potentiel sur une fréquence réservée à des réseaux privés ou des particuliers qui ont fait une demande en bonne et due forme et paient des licences" explique Monsieur Nicolaïe. Pour pouvoir remonter son installation, Pierre Lefort a envoyé une demande à l’ART. Il espère recevoir le soutien des élus locaux. "Ce qui m’écoeure le plus dans cette histoire, c’est le discours des hommes politiques qui affirment depuis des années vouloir développer l’accès à Internet dans les zones rurales, conclue-t-il. En attendant une éventuelle autorisation de l’ART, je vais devoir rebrancher mon vieux modem et payer 2000 francs par mois à France Télécom".
Le site de (la future) association provence-wireless
http://www.provencewireless.net
Le site de l’ANF
http://www.anfr.fr