2/11/2001 • 19h01
Le poker menteur de Microsoft
Le feuilleton du procès Microsoft continue, mais cette fois, nous sommes dans une énorme partie de poker menteur. En se mettant d’accord avec le ministère de la Justice, Bill Gates espère entraîner les 18 ...tats parties au procès dans un deal global. Au nom de quoi ?
L’histoire vaut quand même le détour. Je ne dirais pas que le dénouement est une surprise : il y a trois ans, Transfert écrivait déjà pourquoi Microsoft ne serait pas démantelé. Mais quand même... Qui aurait cru que Microsoft pourrait s’en tirer à si bon compte ? À regarder de près les termes de l’accord, et considérant que Microsoft a été reconnu par les tribunaux (jusqu’en appel) comme ayant abusé de sa position dominante, on a l’impression de voir la firme recevoir un simple "rappel à la loi" du genre de ceux que l’on donne aux mineurs primo-délinquants... Du genre : "OK, vous avez volé les sacs de petites vieilles, mis le feu à quelques poubelles, balancé des pierres sur les voitures de police, et détruit les ascenseurs des immeubles. Hé ben, ce n’est pas bien. Pas du tout. Alors, à partir d’aujourd’hui, vous allez promettre de ne plus recommencer et on va mettre un assistant social qui va vous suivre, et à qui vous promettez de tout dire." Bien sûr, j’exagère. Microsoft n’a jamais agressé de petite vieille. Mais la firme de Redmond a bien été condamnée par des tribunaux pour des actes sérieux (même si certains concurrents ont parfois fait pire sans être condamnés...), et l’accord avec le ministère de la Justice lui demande, surtout, de ne plus recommencer... Microsoft a bien lâché quelques billes sur le secret de ses codes ou une totale collaboration avec des "surveillants" indépendants, mais rien qui mettent en cause le fonctionnement même de la société, ses méthodes et son calendrier futur. Pour la firme, à quelques détails près, l’avenir sera business as usual... On peut penser que le ministère de la Justice a de bonnes raisons pour un tel arrangement. Le soutien de Microsoft au Parti républicain ? Pas suffisant. L’intérêt supérieur de la nation ? Oui, peut-être. Microsoft est une des rares sociétés à tenir son rang à Wall Street, ce n’est pas le moment de mettre la valeur en péril, alors que Ben Laden et les posteurs d’anthrax font tout ce qu’ils peuvent pour ébranler l’édifice économique et politique américain. On assiste à un grand coup de bluff que seule la situation actuelle des ...tats-Unis permet. Car l’accord est tellement déséquilibré au profit de la société de Bill Gates qu’il serait étonnant que les 18 ...tats parties au procès s’en satisfassent. Sauf à faire jouer un sentiment qui n’a rien à voir avec la justice : le patriotisme...
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