Pour résoudre un problème mathématique complexe, des scientifiques américains ont effectué leurs calculs sur des ordinateurs situés en Europe, en Amérique du Nord et en Asie... À l’insu de leurs propriétaires.
Certains chercheurs de l’université Notre Dame, dans l’Indiana, sont sans complexe. Comme tant d’autres de leurs confrères, ils ont tiré parti des calculs effectués par des serveurs web pour résoudre un problème mathématique complexe. La somme de ces calculs, effectués sur des ordinateurs situés sur divers continents, leur a permis de trouver la solution qu’ils cherchaient. Seul problème : aucun des propriétaires de ces serveurs n’était au courant. Et ils ne se sont rendu compte de rien.
Bonne réponse
À chacune de nos connexions, les serveurs web travaillent. Ils vérifient que l’information qui leur parvient, découpée et livrée en paquets, correspond à celle qui a été expédiée. Cette vérification s’effectue via une opération, appelée Checksum, dont les données sont contenues dans les paquets envoyés. L’opération est réalisée à la fois par l’expéditeur et par le serveur : si les résultats correspondent, c’est que l’information n’a pas été détériorée pendant l’envoi. Le problème mathématique que voulaient résoudre les scientifiques américains comportait un nombre très élevé de combinaisons possibles. Pour trouver les bonnes réponses, les chercheurs ont envoyé, à de multiples serveurs, des requêtes dans lesquelles ils avaient remplacé le Checksum par le calcul d’une de ces combinaisons. Les serveurs ont renvoyé aux scientifiques uniquement les réponses dont les résultats correspondaient à ceux que les chercheurs voulaient obtenir...
200 fois moins vite qu’un ordinateur
Certes, la méthode employée ne se révèle pas très productive. Selon le journal Nature, les calculs auraient été effectués 200 fois plus vite sur un ordinateur. "C’est une idée amusante, mais elle n’est pas simple à mettre en place", précise Julien Stern, qui enseigne et étudie la cryptologie à l’université d’Orsay et qui est parvenu, à l’aide de Julien Bœuf, à cracker les algorithmes de protection des fichiers musicaux du SDMI (Secure Digital Music Initiative). Parmi les problèmes inhérents à l’exécution d’une telle opération, ce spécialiste des réseaux évoque notamment les erreurs de calculs. "Un ordinateur qui plante lors d’une connexion ne répondra pas. On risque alors d’interpréter ceci comme une réponse négative alors qu’elle aurait pu être positive." De plus, la méthode peut se révéler coûteuse : "Il faut démontrer que le coût des communication est inférieur au coût des calculs si on les effectue soi-même", ajoute-t-il. Enfin, le problème à résoudre doit se prêter à ces méthodes de calcul. En clair, il existe de nombreux obstacles à surmonter pour pouvoir employer cette méthode. Mais parallèlement à leur performance technique, les scientifiques de l’université Notre Dame sont toutefois parvenus à démontrer qu’il est possible d’utiliser les accès publics du web sans demander la permission...